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… pour être biodégradable ! Fiat rattrape son retard sur la mode des berline bicorps en remplaçant sa 128 par la moderne et décalée Fiat Ritmo. La citadine se distingue de la concurrence non pas par son hayon, qui se démocratise dans le secteur automobile, mais par le nombre innombrable d’éléments en plastique qui ceinturent la voiture, la rendant probablement trop singulière pour le public. Pourvue de belles et nombreuses qualités, la Ritmo se distingue par sa faculté à être biodégradable avec ses plastiques.

Le sens du rythme pour rattraper la concurrence

À la fin des années 70, après avoir cassé la concurrence avec la révolutionnaire Fiat 126, la marque turinoise remet le couvert avec la Ritmo qui prend la suite de la 128 (apparue en 1969) sur le segment des compactes ou berlines moyennes. La nouvelle voiture adopte un profil bicoprs moderne avec un hayon plutôt que la traditionnelle berline à papa tricorps avec sa malle de coffre apparente. Il faut dire que la 128, qui ne quitte le catalogue du constructeur qu’en 1983, a réalisé un joli score et en plus avait déjà mis la fessée à la concurrence avec l’adoption de la traction (voir l’histoire d’Autobianchi). Véritable rupture dans l’histoire de la marque, la berline 128 a aussi été iconoclaste avec la position transversale de son moteur et une boîte en ligne. La rupture technique est difficile à avaler pour la concurrence, qui se doit de réagir. D’ailleurs, la berline à malle remporte le convoité titre de Voiture Européenne de l’Année en 1970.

Fiat Ritmo : le sens du rythme... (1978-1982)
Dans cette teinte orange, la Ritmo est bien dans son époque !

Bon… pour le coup, Fiat n’a pas véritablement vu venir l’avènement du hayon avec les populaires Renault 4, R16, puis R5 qui enfonce le clou. Il n’est jamais trop tard pour prendre le train en marche à Turin, surtout quand on est reconnue pour sa créativité et une technicité sans pareil. Restons avec la mythique Renault 5 qui enfonce un second clou avec ses révolutionnaires (encore !) pare-chocs en polyester, rapidement copiés par la concurrence, à commencer par Fiat qui flaire le jackpot. La marque et son puissant Avvocado (Agnelli, pas le légume) intègre le procédé pour une voiture du segment supérieur en étant plus généreux que Renault. Les pare-chocs en polyester sont une première sur une voiture italienne et de plus directement intégrés au design de la voiture. La Fiat Ritmo doit tailler des croupières sur le segment C face à la Volkswagen Golf ou encore la Lancia Delta

Le projet 138 (son petit nom en interne) voit le jour en 1972. Le projet est ambitieux avec une habilité repoussée à son maximum dans des dimensions les plus réduites possibles. Le cahier des charges prévoit une dimension max de 4 mètres. Concernant le style, la voiture est signée par les designers Pierangelo Andreani et Sergio Sartorelli (au Centre de Style Avancé de Fiat), menés par Gianpaolo Bono (depuis le Centre de Style Fiat) avec un mot d’ordre : être décalé et reconnaissable entre mille. Il semble par contre que le cahier des charges n’ait pas pris en compte la qualité de finition qui va être l’une des principales critiques de la voiture, avec sa corrosion « de série ». Les premiers prototypes se feront discrets sur la route, et le développement durera plus de six ans. En effet, bien avant le projet 138, il y aura les projets X1/30, X1/38, non retenus par la direction du constructeur. Moderne, Fiat revient rapidement à la réalité économique et conserve les suspensions de la 128, des ressorts à lames transversales reliés aux roues arrière. Le châssis est partagé avec la Fiat Regata, version à malle.

Fiat Ritmo : le sens du rythme... (1978-1982)

La Fiat Ritmo en avance sur son temps

Grande révolution chez Fiat avec le lancement de la berline, les chiffres disparaissent au profit d’un patronyme en toutes lettres. Ritmo, un nom qui doit insuffler un nouvel état d’esprit chez le constructeur et ses clients. Les éternelles nomenclatures à chiffres vont disparaître… avant le retour de la 500, en 2007. Si en Europe la berline se nomme Ritmo, le Royaume-Uni a le droit à Strada. Le changement de nom viendrait d’une évocation lubrique, du cycle menstruel féminin dans la langue de Shakespeare. La situation est en réalité toute autre : Fiat a fait le choix d’un nom avec une meilleure sonorité et une prononciation plus simple.

Autre tradition latine, la nouvelle venue se présente durant le Salon de l’automobile de Turin au printemps 1978. Du côté du design, on peut qualifier facilement l’italienne comme un iconoclaste avec son design si particulier. Les lignes sont taillées à la serpe (ou la hache), et répond à la tendance esthétique des années 1970. Toutefois, la Ritmo mélange les genres entre lignes droites, géométries et rondeurs. Les optiques sont rondes, comme un clin d’œil du passé, le pare-chocs avant absorbe la calandre, résumé par les barres imitant le logo Fiat de l’époque, et les coins des ailes. Une ligne principale ceinture la caisse avec des ailes marquées et des poignées de portes circulaires qui représentent un must de design. Tout est beau dans ce dernier, étant presque irrationnel. S’offrir une Ritmo, c’est s’offrir un objet de design italien. À l’arrière, le pare-chocs englobe à son tour les feux arrière et se montre atypique pour l’époque en remontant à mi-hauteur de la caisse. Une voiture vraiment particulière ! À cela se rajoutent les jantes tôle à l’allure originale et… déroutante. Félicitons Fiat pour ce parti pris, marginalisant totalement sa bagnole. Tous les angles de la voiture sont atypiques et surprenants.

Fiat Ritmo : le sens du rythme... (1978-1982)
Trop clivante, la Ritmo ?

Un intérieur aussi spacieux qu’un loft new-yorkais

À bord, Fiat réussit son pari. Tout est optimisé pour offrir le maximum d’espace à ses occupants. S’établissant sur seulement 3,94 m, l’habitacle est une prouesse technique. Avec son hayon, la Ritmo en oublie un peu les bagages avec seulement 370 litres de contenance (soit l’équivalent de la Fiat 127). Dès son lancement, la Fiat est disponible en 3 et 5 portes avec deux niveaux de finition (L et CL) et quatre moteurs allant de 60 à 78 chevaux. De plus, la dernière motorisation se greffe à une boîte automatique. Aussi audacieuse et ingénieuse soit-elle, la Ritmo finit seconde au podium de la Voiture Européenne de l’Année 1979, vaincue par la Simca Horizon, encore plus habitable car plus grande et surtout bien mieux finie…

Fiat revoit sa copie dès 1979 avec des améliorations qui portent sur la qualité de finition. L’équipement est enrichi et une finition haut de gamme Targa Oro met en avant tous ces changements. Dans le même temps, la Fiat Strada prend du bon temps en arrivant sur le sol américain. La Ritmo américaine, comme les autres voitures européennes, doit s’adapter aux normes de sécurité locales avec la greffe d’immondes gros boucliers (AV/AR) destinés à l’absorption des chocs, dénaturant le dessin initial, avec une calandre… rectiligne et impersonnelle.

Bon, gagnons du temps : la carrière de la Strada/Ritmo chez l’Oncle Sam va faire un flop et se faire discrète avant de disparaître après trois millésimes. La compacte va tout de même avoir une petite carrière en Egypte en y étant fabriquée au compte-gouttes (sans avoir les chiffres) ou encore en Amérique du Sud, plus précisément au Chili, avec un peu plus de 2 000 exemplaires. La Fiat Ritmo profite tout de même d’un petit intérêt aux États-Unis, après la confession de Barack Obama durant un voyage à Rome en 2014, où il reconnaît avoir eu une Strada dans sa jeunesse (tout comme une Chrysler 300C).

Fiat Ritmo : le sens du rythme... (1978-1982)
La version diesel se reconnaît à sa calandre ajourée.

Évolution de gamme

En 1980, la Fiat Ritmo gagne encore des points d’amélioration avec une nouvelle motorisation diesel 4 cylindres 1 714 cm3 de 55ch. Pour reconnaître la version diesel, c’est simple : la Ritmo reçoit des ouïes de refroidissement sur la face avant. À bord, les panneaux de portes sont remplacés par des éléments de meilleur qualité. Le feu déflecteur de la version 5 portes est supprimé, les rétroviseurs extérieurs trapézoïdaux laissent la place à un modèle articulé, l’essuie-glace arrière profite d’un balai allongé et passe en position verticale. Le logo rectangulaire et lettré de Fiat disparaît au profit d’un blason circulaire à fond rouge sur la face avant. L’année suivante, la Targa Oro laissera sa place aux versions Super 75 et Super 85, qui se singularisent par un nouveau tableau de bord plus qualitatif. Au passage, la Super 85 reçoit une nouvelle mécanique 1.5l de 85ch.

En 1982, Fiat revoit plus lourdement le design de Ritmo avec un nouveau faciès moins particulier, plus sobre et moins déroutant, que nous ne détaillerons pas ici. Mais, revenons en arrière quelques instants. Lors du Salon de Francfort 1979, Bertone propose un prototype quasi définitif de la Fiat Ritmo cabriolet. La version de série ne déboule qu’à partir du millésime 1981 (soit septembre 1980), à l’édition du Salon de Francfort 1980. Comme la plupart de ses concurrentes de la même époque, la Ritmo cabriolet profite d’un sublime horrible arceau de sécurité, obligatoire. La version cabriolet profite du plus puissant bloc au catalogue (en omettant l’Abarth), à savoir le moteur de 85ch. Le châssis de la Ritmo reçoit des renforts en X pour soutenir la caisse, créant des bosses dans le plancher.

La version « cheveux au vent » fait également un flop dû au maniement complexe de la capote et à son tarif, aussi corsé qu’un ristretto à Turin. Directement transformé chez Bertone, le cabriolet disparaît en 1985. Même Bertone n’en fait qu’à sa tête et continue de proposer le cabriolet qui devient au passage la Bertone Supercabrio. La puissance est retravaillée pour offrir 100ch et disparaît en même temps que la Ritmo phase 2 en 1988.

Fiat Ritmo : le sens du rythme... (1978-1982)
Ceci n’est pas une Ritmo cabriolet mais une Bertone Supercabrio.

Au printemps 1981, Fiat cède à la mode des GTI en dévoilant la Ritmo 105 TC. Sous le capot, on retrouve le bloc de 1 585 cm3 de la 131 Mirafiori à double arbre à cames en tête avec une puissance de 105ch. Uniquement en 3 portes, elle adopte un look sportif avec un spoiler avant, des phares additionnels et un béquet placé au bas de la lunette arrière. La Ritmo 105 TC remporte un gros succès avec plus de 8 000 exemplaires écoulés après sept mois de commercialisation. En 1982, Fiat récidive avec la tonitruante Fiat Ritmo Abarth 125 TC, aidée par les équipes… d’Abarth. Sous le capot, la Ritmo Abarth reçoit un bloc 2.0l de 125ch avec un cocktail sportif digne du sorcier de Turin. La compacte affole les chronos avec une V/max fixée à 190 km/h couplée à un grand confort. Après le restylage de 1983, la puissance grimpe à 130ch. La Ritmo Abarth est le dernier modèle en collaboration avec le préparateur avant sa léthargie qui dura jusqu’au milieu des années 2000.

La Ritmo phase 1 disparaît en 1982, bien que sa carrière termine en 1988 après plus de 2 millions d’exemplaires. Ce must have du design italien est tombé dans l’oubli (mis à part les modèles Abarth). Alors, l’italienne offre le moyen de se différencier à peu de frais de la plus belle des manières avec une compacte au style clivant et différent.

Fun fact : en 2008, lors de l’arrivée de la Fiat Bravo en Australie, cette dernière prend le nom de Ritmo.

Fiat Ritmo : le sens du rythme... (1978-1982)
Regardez bien, ce n’est pas une Fiat Bravo mais une Fiat Ritmo, en Australie !

L’Avis des Cylindres :

La Ritmo est une italienne comme on les aime : c’est fiable mais ça rouille. Les moteurs sont robustes et fiables mais entre la carrosserie qui finit en dentelles et la finition désastreuse, beaucoup d’exemplaires ont disparu en poudre ou réincarnés en un magnifique Géranium. Comme quoi, Fiat avait pensé avant Citroën à la voiture recyclable. Les primes à la casse instaurées dans les années 1990 ont fait pas mal de victimes au passage, comme d’autres voitures des années 1980.

Dégoter un exemplaire sain relève du miracle. Avec sa ligne atypique et ses couleurs totalement dépassées, c’est une voiture à conserver et à profiter aux beaux jours, qui saura vous mettre la banane, faisant oublier ses défauts qui lui ont coûté sa carrière.

Une Ritmo avec des travaux demande 1 000 €, quand une version saine demande au minimum 5 000 € et, selon les options, grimpe jusqu’à 10 000 €. Les versions Abarth que nous n’avons pas réellement abordées demandent pour la plupart 20 000 €. Les exemplaires sont rares, il faudra se montrer patient ou sacrifier la version qu’on souhaite… pour avoir le rythme dans la peau.

Fiat Ritmo : le sens du rythme... (1978-1982)

Le Cylindres en + :

Production : 1978-1982, en Italie, Espagne, Chili et Egypte
Transmission : traction
Moteur : 4 cylindres Essence, 1 116; 1 301; 1 498; 1 585 (cm3) / 4 cylindres Diesel, 1 697; 1 714; 1 995 (cm3)
Poids : 860 à 905 kg
Dimensions : 3 937 x 1 650 x 1 400 mm (Lxlxh)

GALERIE

VIDEO

Via Fiat, Wikipédia

Guillaume Pina

Passionné par l'automobile depuis tout petit, j'adore l'automobile ancienne, mais aussi les plus récentes. Je m'intéresse tout particulièrement au design des voitures, les anecdotes autour de leur conception et encore plus quand elles ont fait un flop !

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