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Parfois, dans la vie, la bonne idée ne l’est pas toujours. Honda va en faire l’amer expérience avec la Honda CR-Z et son petit bloc hybride. Sur le papier, l’idée est excellente : le constructeur japonais est seul sur le créneau du petit coupé hybride. L’occasion là de tailler des croupières à Toyota, maître de l’hybride. Sous ses aspects fun et décalé, le CR-Z ne va pas réitérer l’exploit du CR-X et tomber dans l’oubli. Ça tombe bien, l’occasion de le remettre un peu en lumière avec son bloc hybride dans l’air du temps.

La Honda CR-Z, descendante spirituelle de la CR-X

Honda s’est taillée un nom (du moins en Europe) avec des petits coupés sportifs et abordables. Dans les années 1980, la gamme Civic s’élargit avec de nombreuses déclinaisons de berline (Ballade) et break Shuttle, mais surtout le retour de la marque dans les coupés avec la CR-X qui surfe sur le succès en Formule 1 de la marque au H. Malheureusement, le tuning va défoncer le pauvre petit coupé qui devient la star des amateurs du dimanche matin sur le parking du *insérer un nom de supermarché* avec disparition des exemplaires sains et d’origine.

Le Honda CR-X tient en haleine les passionné(e)s de 1983 à 1999, lorsque la troisième génération de CR-X Del Sol prend sa retraite sans descendance. Les amateurs du genre vont se rabatte sur les dernières générations de Toyota Celica, jusqu’à son départ en 2006. Y a de quoi finir comme Britney Spears à se raser les cheveux là, non ? Presque. Ne soyons pas trop mélancoliques parce qu’en face, ni Suzuki ni Mitsubishi n’offrent dans sa gamme un coupé aussi amusant à conduire qu’une Toyota Celica ou Honda CR-X. Alors, quand Honda présente en 2007 le prototype CR-Z Concept pendant le Salon de l’automobile de Tokyo, on y croit, on le veut et on l’aura, comme le chantait Joe Dassin. Le concept s’étire sur 4 080 mm de long, 1 740 mm de large et 1 395 mm de haut ! C’est compact, on salive dans toute la presse auto et chez les fans de la marque.

Le concept 2+2 est en plus séduisant dans son dessin. Que demande le peuple ? Le profil évoque le CR-X, le pavillon de toit est fuyant, les lignes des flancs sont fluides, ça transpire le sport, les grosses jantes alu éveillent des envies brutes d’en prendre le volant, et la face avant se montre sobre et moderne. Sous le capot, le coupé embarque un ensemble hybride similaire à l’Insight qui dérive de la Honda Jazz. Le bloc hybride 1.5l développe 110 chevaux, aidé d’un moteur électrique de 14ch — le tout offrant 124ch. La voiture propose également trois modes d’utilisation : Normal, Eco et Sport. La vraie surprise vient de sa transmission manuelle à 6 vitesses.

Honda CR-Z : l’hybride, c’est (pas toujours) fantastique
Annoncée en 2007, le Honda CR-Z arrive début 2010 sur le marché

Un (vrai) souffle d’air frais

Le développement du Honda CR-Z se fait au Japon avec une équipe dirigée par l’ingénieur Norio Tomobe, qui suit le projet jusqu’au premier exemplaire qui sort des chaînes de l’usine de Suzuka, au Japon. Pour dessiner et concevoir son nouveau modèle, le constructeur fait appel à ses designers japonais, ayant eu une expérience avec les goûts des conducteurs d’Europe. Car oui, le coupé est avant tout destiné à nous, Européens. Les designers choisis pour le développement ont par le passé travaillé au siège européen de Francfort. La direction esthétique du projet CR-Z est menée par M. Minova, sous la direction de M. Endo, directeur du design Honda. La maxime « Fun To Drive » (cf. amusant à conduire) est la ligne directrice de la voiture, soit une définition du véhicule autour des valeurs sportives, de la technologie hybride et d’un design évocateur.

Honda CR-Z : l’hybride, c’est (pas toujours) fantastique
Dans les grandes lignes, la CR-Z s’inspire de la mythique CR-X des années 80/90

On l’a dit, le design du CR-Z s’inspire fortement de son aïeul tout en intégrant un design moderne. L’autre inspiration n’est pas à chercher très loin, puisque le lancement du coupé intervient quelques mois après le lancement du nouveau fer de lance de la marque au H : l’Insight. Décidée à ne pas se faire voler la vedette par Toyota et son affreuse Prius qui domine le marché des hybrides, Honda veut sa part du gâteau et mettre fin au monopole de son concurrent. C’est ainsi que la marque ne lance non pas un, mais bien deux nouveaux véhicules hybrides ! La marque au H coupe l’herbe sous le pied de son concurrent en dévoilant en premier un coupé doté d’une transmission hybride !

La Honda CR-Z prend son premier bain de foule lors du Salon de Genève 2010 et la presse l’accueille favorablement. En effet, les journalistes salivent devant la sportive hybride qui permet de remettre Honda sur le devant de la scène avec un certain lien entre plaisir de l’automobile et écologie. Nous sommes encore aux prémices des enjeux environnementaux que nous connaissons aujourd’hui. Surtout, l’apparition de notre coupé intervient alors que le constructeur japonais abandonne le programme Formule 1 et, pire encore, l’annulation du projet de la NSX de deuxième génération. Pour avoir du sport chez Honda, il faudra faire avec les technologies alternatives. Sur le papier, la voiture s’annonce excitante ! Avec son profil tronqué et sa gueule béante, prête à aspirer le bitume (et les moustiques), le coupé CR-Z fait son petit effet.

Honda CR-Z : l’hybride, c’est (pas toujours) fantastique

L’hybride, c’est pas toujours fun

Connue pour être un motoriste de renom avec par exemple le fabuleux système V-Tech, on attend beaucoup de la part de Honda avec son coupé hybride. Impatiente et attendue au tournant avec son modèle, Honda va se prendre un mur lors des premiers tests routiers. Sous son capot plongeant, la japonaise n’embarque pas le plus performant des VTEC, mais un bloc hybride quatre cylindres 1 497 cm3 essence partagé avec la Jazz et l’Insight. Le bloc offre 98 chevaux, couplé à un générateur électrique de 26ch, pour développer la puissance folle et sidérante de 124ch. Très loin d’une débauche de puissance, la Honda reste très sage, mais le constructeur annonce un châssis typé sport en plus d’une transmission manuelle à 6 rapports.

Dommage, car dans son catalogue, la marque offre des blocs 1,2 et 1,4 à calage variable avec contrôle de la levée des soupapes bien plus appétissants. Il n’empêche que le coupé étrenne une première mondiale pour une voiture hybride et c’est ça qui rend le coupé original ! Il se passe de la boîte CVT (ou transmission à variation continue) qui hurle ou beugle comme chez Toyota (ça, c’était gratuit). L’argument sport de notre japonaise n’est donc pas sa puissance mais tout simplement sa boîte mécanique ! À ce titre, sur les autres marchés (hors Europe), la japonaise propose en option une boîte CVT. Comme quoi, un rien peut vous décevoir…

Honda CR-Z : l’hybride, c’est (pas toujours) fantastique
Merci de ne pas avoir acheté l’Insight, je t’aime chéri

Pour le reste, la voiture veut séduire les Européens en prouvant que l’hybride peut être fun et amusante à conduire. Les ingénieurs japonais travaillent aussi à offrir une voiture très rigide pour offrir un maximum de sécurité en cas d’accident, mais aussi assez légère pour ne pas avoir à augmenter la puissance de l’ensemble motopropulseur. De quoi tout même transfigurer l’agrément du coupé 4 places face par exemple à une Prius mais aussi face à l’Insight, sa sœur technique, la Jazz et la Civic hybride. La CR-Z reste une vraie Honda et profite d’une accroche à la route propre à la marque avec une boîte mais aussi un châssis aux petits oignons pour une conduite dynamique. Le coupé 2+2 reçoit des suspensions raffermies et des barres antiroulis renforcés. Tous les ingrédients sont réunis pour offrir un coupé hybride hyper fun.

Malheureusement, le coupé n’est pas sportif pour autant. La puissance pose problème. Certes trop limitée pour un véhicule sportif, le petit coupé GT file à tout de même à 200 km/h en vitesse de pointe, et annonce un 0 à 100km/h en 9,9 secondes — pas si mauvais pour une voiture hybride. Les critiques lui reprochent son manque de puissance et surtout sa très trèèèèèèèèèèèèèèès longue sixième vitesse. Sur autoroute, il faut rétrograder pour relancer la machine et le régime max est très bas pour un moteur V-Tech (à 6 400 tr/min). Tout n’est pas négatif : le bloc, un peu bruyant, possède une belle sonorité.

Honda CR-Z : l’hybride, c’est (pas toujours) fantastique
On ne dirait pas comme ça, mais en 2012 Honda revoit (légèrement) sa copie

À bord, soupe aux choux et navette spatiale

Si l’extérieur est une invitation à la sportivité, l’intérieur est rétrofuturiste — tout est délirant à bord. On a un écran tactile excentré et surtout des satellites dignes d’une Citroën des années 1980 autour du volant. On ne sait pas si on conduit une Honda ou le Faucon Millenium — enfin si, y a un H sur le volant. La finition profite aussi d’un soin particulier. À l’arrière, les passagers seront collé-serrés avec une hauteur plutôt basse si l’on mesure plus d’un mètre quatre-vingt, tout comme la place pour les jambes. La presse critique également la vision trois quart arrière jugée déplorable, avec le traitement esthétique entre les portières et la poupe. Tant pis pour les passagers arrière, ceux à l’avant sont à leur aise. Proposée à 25 390 € (28 843 € actuels) en version Elantra, les prix la placent plutôt haut de gamme.

Honda CR-Z : l’hybride, c’est (pas toujours) fantastique
Commet toujours avec les japonais, la mécanique se monstre simple mais fiable

Pour sauver la baraque, Honda offre une première cure de jouvence au coupé dès le mois de janvier 2013 avec l’espoir de relancer les ventes. Sous le capot, point de modification, mais un remplacement des batteries NiMH pour des Lithium-Ion, plus légères et plus puissantes. Les modifications esthétiques sont subtiles (voire invisibles), tandis qu’à l’intérieur le coupé 2+2 abandonne son tableau de bord bicolore pour du noir et apparaît un bouton S+ qui permet pendant 10 secondes d’offrir un boost. La gamme se réduit à GT et Luxury. En 2014, l’État réorganise les règles du bonus-malus qui privent le CR-Z de toute aide. Les ventes s’effondrent alors de 66%, Honda jette l’éponge.

Malheureusement, malgré une ligne attachante, un design sportif et transpirant de clin d’œil à la mythique CR-X, le Honda CR-Z va faire un bide monumental. La faute à sa motorisation pas tellement sportive mais plutôt GT. Le constructeur japonais a fait un pari (pas si) fou de proposer un coupé à motorisation hybride avec une configuration unique sur la marché avec sa boîte manuelle à 6 rapports. La japonaise disparaît en 2014 en Europe, voire 2015 pour les derniers exemplaires, continuant sa carrière au Japon où elle bénéficiera d’une mise à jour mécanique pour atteindre les 137ch. Malheureusement, le Compact Renaissance Zéro n’aura pas de suite et disparaîtra totalement de la surface de la terre (ou plutôt des chaines de production) en 2016.

Honda CR-Z : l’hybride, c’est (pas toujours) fantastique
On a l’impression d’être face un vaisseau spatial avec ce mobilier

Le cas Honda CR-Z Mugen

Mugen vole au secours de Honda avec une version musclée du CR-Z. Le préparateur y ajoute un compresseur et un échangeur air/air, qui permet de sortir du moteur thermique 156ch. L’ensemble thermique et électrique permet d’atteindre la puissance de 174ch, de quoi pouvoir battre le fer avec les Renault Megane, Volkswagen Scirocco ou encore Hyundai Veloster. Face à ce succès, la Honda CR-Z sort au Japon et en Grande-Bretagne, en série limitée. Honda France fera tout pour sortir cette version, hélas sans réponse de la part de maison-mère. Il existe un exemplaire pour le marché français qui ne sera pas homologué. Ce modèle aura servi pour prendre la température auprès du marché français, sur le circuit de la Ferté Gaucher (merci Thomas pour l’anecdote). Esthétiquement, la Mugen gagne une calandre plus large pour faire refroidir le moteur, des jupes latérales et un kit carrosserie démonstratif… sans oublier l’aileron.

Toutes ses transformations permettent au coupé d’abattre le 0 à 100 en seulement 6,3 secondes. Presque démoniaque, la Mugen profite d’une suspension réglable ainsi qu’un frein plus puissant derrière des jantes 17 pouces. La Honda CR-Z Mugen ne compte que 3 000 exemplaires et un prix de vente de 45 000 €.

Honda CR-Z : l’hybride, c’est (pas toujours) fantastique

L’Avis des Cylindres :

La Honda CR-Z est un petit coupé qui privilégie le confort et l’économie plutôt que le sport et les performances. Véritable petite GT 2+2, la japonaise se pose comme une alternative au Peugeot RCZ, qui se déguste plutôt en diesel mais qui affiche des blocs bien plus puissant. S’offrir ce bijou de technologie japonaise, c’est s’offrir un concentré de savoir-faire Honda, même si le bloc 1.5 V-Tech manque de noblesse — ou plutôt de performances. Reste que le coupé a d’autres arguments à faire valoir comme une ligne atypique, un poste de conduite interstellaire et une habilité suffisante pour deux. Le coupé CR-Z offre aussi une excellente fiabilité moteur et électronique. Il n’y a rien à redire de ce côté. Pour finir ce chapitre, la Honda CR-Z propose quatre finitions : S, Sport, GT et Luxury. On se tournera davantage vers les finitions GT et Luxury mieux équipées (la Luxury ajoute même le toit panoramique de série). Des packs sont aussi disponibles pour enrichir l’équipement du coupé, avec Electra, Métal ou encore Navi qui rajoute — vous vous en doutez — le GPS.

Proposition originale avec son look sympa, le CR-Z se fait rare en occasion. Avec un peu de patience, on peut trouver les premiers modèles de 2011 pour 10 000 € avec un peu plus de 100 000 kilomètres. En dessous des 100 000 kilomètres, les prix remontent vers 11 500 €. On trouve même des modèles avec moins de 90 000 km pour 13 000 €.

Le Cylindres en + :

Production : 2010-2015
Moteur : L4 1497 cm3 V-Tech (110ch), hybride (essence + électrique)
Puissance : 124ch à 6400 tr/min avec l’aide d’un moteur électrique de 14ch
Couple : 174 Nm
Transmission : traction avec boîte manuelle 6 vitesses 
V/max : 200 km/h
Accélération (0 à 100km/h) : 9,9 secondes 
Consommation : 5,0l litres
Norme d’émission : 117gr de CO2
Volume du coffre : 233 à 401 dm3

GALERIE

VIDEO

Via Auto&Design, Honda France

Guillaume Pina

Passionné par l'automobile depuis tout petit, j'adore l'automobile ancienne, mais aussi les plus récentes. Je m'intéresse tout particulièrement au design des voitures, les anecdotes autour de leur conception et encore plus quand elles ont fait un flop !

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