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Ah, Subaru… Comme de nombreux constructeurs japonais, c’est une marque d’ingénieurs. Sous nos contrés, on connaît surtout les fameuses livrées bleues, engagées en rallye. Mais Subaru commercialise aussi des voitures civiles dans sa gamme. Après s’être lancée avec succès à la fin des années 1990 dans le domaine des « petits » 4×4, Subaru s’aperçoit que sa clientèle très fidèle est à la recherche d’un véhicule plus grand, et les modèles 7 places ont le vent en poupe. La marque dévoile le Subaru B9 Tribeca et sa « gueule »… Mais qu’est-ce qu’elle a, ma gueule ?

Comme toujours, Subaru pense au marché US

Comme souvent, c’est aux États-Unis que la demande est la plus forte. Au milieu des années 2000, c’est au tour des constructeurs généralistes présents sur le sol US de répliquer à BMW et Mercedes qui commercialisent chacun leurs SUV « mid-size » qui se vendent comme des petits pains. Honda lance le Pilot, Toyota le Highlander, Nissan réplique avec le Murano, Mazda oppose le CX-9, Chevrolet contre la concurrence avec Trailblazer et son cousin le GMC Acadia, et Ford propose le Flex…

Bref, pour Subaru, il n’y a pas de raisons de ne pas proposer aussi son offre. Les ingénieurs maison vont partir de la Legacy/Outback pour allonger la plateforme et pour y caser 7 sièges. Au même moment, Subaru se renouvelle stylistiquement et embauche le designer grec Andreas Zapatinas, qui a notamment travaillé pour Fiat. C’est lui qui a dessiné la Fiat Barchetta (que notre cher Guillaume affectionne tant), et c’est aussi le père (entre autres) des Alfa 145 et 147.

Andreas Zapatinas

Au salon de Tokyo de 2003, Subaru présente le B9 Scrambler, un concept de roadster, fun avec sa carrosserie bicolore, et son pare-brise teinté en jaune. Sous le capot se cachait un 2.0 140 chevaux associé à un moteur électrique de 135 chevaux. Le concept était équipé d’une suspension pneumatique.

Le concept annonçait le futur style de Subaru et l’on retrouvait déjà les prémices de la calandre de la discorde. Pourtant, Subaru a bien essayé d’habituer le public à cette calandre avec le concept B11S, présenté à Genève en 2003. Pourquoi cette fameuse calandre ? Selon Subaru, elle représente les ailes et le fuselage d’un avion ⏤ hommage aux origines de Subaru. Comment ça, les origines ? Oui, la maison mère de Sub’ est aussi spécialisée dans l’aviation !

En 1917, Chikuhei Nakajima fonde la Nakajima Aircraft Company, qui sera le premier avionneur du Japon. De ses usines sortiront les bombardiers, avions de chasse, des avions de reconnaissance… Au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, l’entreprise est divisée en douze identités. Six d’entre elles s’associent et fondent la Fuji Heavy Industries. Le groupe commence à produire des scooters, des bus (premier bus japonais à suspension pneumatique) et, au début des années 1950, produit sous licence le Beechcraft T-34, un avion d’entraînement militaire américain doté d’un moteur à plat. C’est cette fameuse disposition que va avoir droit la majorité des véhicules Subaru avec la 1000 (qui sera aussi la première voiture japonaise à traction), permettant moins de vibrations, un meilleur équilibre et abaissant le centre de gravité. Ce sont les fameux moteurs Boxer, utilisés aussi par un autre constructeur de renom : Porsche, avec sa fameuse 911. Le groupe produira ainsi diverses machines roulantes : train, bus et donc des voitures avec Subaru en 1953. Le premier modèle sera la 360.

Pourquoi Subaru ? C’est le nom japonais des Pléiades. D’ailleurs, le logo de la marque fait référence à l’amas. Subaru signifie aussi unité, se réunir. Le logo, composé de six étoiles, fait référence aux six entreprises réunies pour créer Fuji Heavy Industrie. FHI va ainsi continuer d’être un groupe industriel et, dans les années 1990, est associé à la conception du Boeing 777 en produisant le caisson central reliant les deux ailes et qui sert également de réservoir central au triple sept. Boeing continuera de faire appel à FHI pour le caisson du 787 Dreamliner.

Parmi les équipementiers du 777, on retrouve aussi d’autres noms de groupe qui produisent des voitures comme Mitsubishi, SAAB et le fabricant de moto Kawasaki.
Subaru sur terre et dans les airs.

Bref, au milieu des années 2000, Subaru lance donc le B9 TRIBECA. Mais pourquoi un tel nom ? B fait référence au moteur Boxer typique de Subaru, le 9 indique la position dans la gamme (un véhicule haut de gamme et novateur). Et TRIBECA ? Le nom vient d’un quartier de New-York, parfois écrit TriBeCa pour TRIangle BElow CAnal Street. En gros, un quartier délimité par Canal Street, Brodway et le Holland Tunnel. À l’origine, ce quartier est une zone industrielle, proche du port, dans laquelle les entreprises en profitent pour exporter leurs productions. Au cours des années 1980, divers artistes squattent les entrepôts et autres ateliers laissés à l’abandon.

Puis, dans les années 1990, le quartier bénéficie d’un plan de remise à neuf de la ville. Les friches industrielles sont transformées en logement et les vastes entrepôts en loft. C’est ainsi que les prix des loyers ont augmenté, poussant les artistes et jeunes talents sans le sous à partir, tandis que diverses stars sont venues s’y installer ⏤ Meryl Streep, Mariah Carey, Justin Timberlake, Chris Martin et Robert De Niro notamment.

Je suis heureuse, j’ai un Tribeca !
C’est dans ce quartier que se trouve la fameuse caserne de Ghostbusters.
Meryl Streep songeant à son B9 TRibeca bleu céruléen.

Robert De Niro sera à l’origine du Tribeca Film Festival, un festival de films indépendants, de court métrages et de documentaires à but non lucratif afin de redynamiser le quartier après les attentats du 11 septembre 2001.

Des stars, du people et Subaru

Donc, Subaru s’est dit que ce serait une bonne idée d’associer le nom de ce quartier à son SUV afin d’avoir une image chic, branchée et progressiste. En 2005 est lancé le B9 Tribeca, conçu et commercialisé surtout sur son marché de prédilection : les États-Unis. Sous le capot, on retrouve le fameux moteur Boxer 6 cylindres 3.0 de 245 chevaux, associé à une boîte automatique à 5 rapports. Mais l’ensemble est juste face au poids de 1 900 kg. Le 0 à 100km/h est abattu en 9,7 secondes, soit l’équivalant d’une berline familiale diesel de la même époque. Il faut dire que la boîte n’est pas à la hauteur et est assez castratrice. Côté consommation, il faut compter environ 13l/100km en usage mixte. Avec le réservoir de 64 litres, il ne faut pas espérer faire plus de 500 km avec un plein.

Voilà ce que donne un moteur à plat.

Tradition Subaru oblige, la transmission est intégrale avec une prédominance pour l’arrière (45 % / 55 %). Pour le côté positif, Subaru n’a pas lésiné sur l’équipement. Clim auto bi-zone, caméra de recul, GPS à écran tactile, jante alu de 18 pouces, lecteur DVD à l’arrière…

Le B9 permettait de prouver que Subaru était capable de produire autre chose que des voitures de rallye.

À bord, sept places et un volant

L’intérieur n’est pas en reste avec son style dessiné par notre cher Andreas. En revanche, la qualité des plastiques est clairement en deçà du BMW X5 qui a pourtant servi de benchmark à Subaru. Par ailleurs, le comportement routier est à la hauteur et le confort de très bon niveau. Malheureusement, entre le prix plus élevé que le Honda et le Toyota, la fameuse calandre associée aux optiques triple cylindres et à la concurrence étoffée, les clients ne se bousculent pas aux portes des concessions Subaru. La marque importera en Europe fin 2006 le B9, mais, dans nos contrées, un tel SUV sans moteur plus performant ou plus économique n’a point de salut. En 2007, deux ans seulement après le lancement, Subaru restyle son SUV 7 places qui ne s’appelle plus B9 Tribeca, mais simplement Tribeca. La calandre « aviation et Alfa Romeo » est partie aux oubliettes, tout comme les feux si particuliers. Le constructeur redessine légèrement l’arrière de la voiture et l’intérieur afin d’avoir un peu plus de place. La face avant devient plus banale, le moteur voit sa puissance progresser légèrement grâce à sa cylindrée porté à 3.6, et la gestion de la boîte est revue.

Subaru B9 TRIBECA : Quoi ma gueule ? Qu'est-ce qu'elle a ma gueule ? (2005-2014)
Un physique pas facile…

Tous ces efforts ne suffisent pas à redresser la barre. Général Motors, la toute-puissance industrie automobile américaine (aux idées les plus farfelues), a pris 20 % du groupe FHI en 1999. GM à ce moment a une idée en tête : rapprocher Opel, SAAB et Subaru entre eux. GM a toujours eu cette philosophie : une voiture, plusieurs marques. Ainsi, aux origines de GM, le client achetait une Chevrolet, puis montait en gamme en achetant une Pontiac, puis une Oldsmobile et il échangeait cette dernière contre une Buick et enfin une Cadillac.

Oui mais voilà, si cette stratégie fonctionnait avec les constructeurs américains et leurs clients, GM n’a pas compris que cela ne marchait pas avec les constructeurs européens et leurs clients. Au début des années 2000, GM s’aperçoit que les constructeurs allemands descendent en gamme. Audi commercialise l’A3, Mercedes la Classe A et BMW va bientôt dévoiler la Serie 1. Du coup, GM se dit qu’il y a une opportunité à saisir, mais comme SAAB ne rapporte pas d’argent, pas question de trop dépenser. On va puiser alors dans la banque d’organe et prendre pour base la Subaru Impreza. GM va modifier les logos, la face avant et les feux arrière. Le plastique de la console centrale sera gris façon alu et puis ça fera bien l’affaire !

Subaru B9 TRIBECA : Quoi ma gueule ? Qu'est-ce qu'elle a ma gueule ? (2005-2014)
Le nom complet apparaît pour cette phase 1 – Subaru B9 Tribeca

La 9-2 sortira des chaînes de Subaru au Japon, et non en Suède. Et ce n’est pas un franc succès, avec 10 322 exemplaires produits entre 2004 et 2007. Elle sera souvent surnommée Saabaru. Autre modèle rebadgé : le SAAB 9-7X, un Chevrolet Trailblazer. Il s’agit là d’une SAAB avec un V8 et produit aux USA ⏤ encore une idée signée GM, et encore un échec avec environ 20 000 exemplaires produits.

Et pourtant, GM travailla à faire une SAAB 9-6X sur base de la Subaru B9 Tribeca. Deux prototypes auraient été construits mais GM revendant ses parts dans Subaru en partie à Toyota en 2005, le projet n’aboutira pas. Si SAAB a été dénaturée et a beaucoup perdu de plumes au point de mettre la clé sous la porte à la fin des années 2000, Subaru a pu mieux résister et se sortir des griffes de GM grâce à leur architecture boxer et leurs plateformes spécifiques. En effet, les plateformes Subaru n’étaient pas compatibles avec une autre architecture moteur et vice-versa. Le Tribeca continua sa route tranquillement. Quittant le marché européen en 2009, il continuera de se vendre outre-Atlantique jusqu’en 2014. Au final, moins de 80 000 exemplaires trouvaient preneurs en neuf ans de carrière. À l’été 2018, Subaru a appris de ses erreurs et commercialise l’Ascent. En 2019, après une année pleine, l’Ascent s’est mieux vendu que l’ensemble de la production du B9 en neuf ans.

Subaru B9 TRIBECA : Quoi ma gueule ? Qu'est-ce qu'elle a ma gueule ? (2005-2014)
Le B9 en haut des ventes, non de la colline.

L’Avis des Cylindres :

Passionné(e) de véhicule atypique, foncez ! Le Subaru vous permettra de vous distinguer assez des autres SUV familiaux à 7 places. Spacieux, confortable et différent, c’est l’occasion de redécouvrir la marque japonaise et de profiter de son fabuleux moteur à plat boxer.

Chez Subaru, la mécanique, c’est du costaud ! On note tout de même ⏤ à cause du poids ⏤ des faiblesses, notamment avec les coupelles de suspensions qui s’usent prématurément avec des « claquements » lors des manœuvres, à vérifier lors d’un essai. Enfin, on parle aussi de souci avec le maître cylindre qui fuit après 160 000 kilomètres et le débitmètre qui rend l’âme au même kilométrage. Certains utilisateurs remontent un autre point faible : la direction imprécise (ou plutôt à l’américaine), qui demande pas mal d’attention, ce qui peut provoquer un effet « mal de mer » pour les passagers.

Du côté du portefeuille, on trouve des premières séries au même prix que les dernières versions de 2014. Peu importe le kilométrage, seul l’équipement et la « gueule » pourront vous permettre de faire un choix. On trouve des exemplaires de 2005 comme de 2010 avec moins de 100 000 kilomètres pour 13 000 €. Au-dessus de 100 000 kilomètres, le Subaru demandera un chèque du prix du mètre carré d’un appartement face à la tour Eiffel, soit 9 500 €. Alors entre 1 m² à Paris et un super véhicule familial pour 7, le choix se porte sur le SUV à la consonance américaine.

Subaru B9 TRIBECA : Quoi ma gueule ? Qu'est-ce qu'elle a ma gueule ? (2005-2014)
Dès 2007, le Subaru B9 Tribeca profite d’un replâtrage.

Le Cylindres en + :

Motorisation :
– 6 cylindres boxer 3.0 245ch
– 6 cylindres boxer 3.6 256ch
Transmission : intégrale via boîte automatique à 5 rapports
Accélération 0 à 100 km/h : 8,9s (245ch)
Longueur : 4 865 mm
Largeur : 1 880 mm
Hauteur : 1 720 mm

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