Vous me voyez encore venir avec mes gros souliers : les marques françaises ont une tradition à sortir des concept-cars pour… rien ! Enfin, un concept n’est jamais gratuit ⏤ bien au contraire ⏤ mais il permet d’annoncer des éléments de design, de confort ou de technologie pour les prochaines générations de voitures. Mais alors quand Peugeot dévoile la Peugeot 607 Pescarolo, on y croit, on la veut et plus de vingt ans après on se dit : tout ça, pour ça !
Un missile français contre les tanks allemands
On critique souvent la froideur des constructeurs français sur de véritables modèles haut de gamme et surtout sportifs. Toute l’histoires de l’automobile française est jalonnée par des déceptions et des regrets. Le dernier date de 2018 avec la très réussie Peugeot E-Legend qui fêtait les 50 ans de la mythique Peugeot 504 coupé. Vingt ans plus tôt, Peugeot nous gratifie d’une berline racée et sacrément sportive avec la Peugeot 607 Pescarolo. Au début des années 2000, les marques allemandes ont absorbé l’essentielle des ventes des berlines du segment D et E, laissant des miettes aux autres marques. Les Citroën C6, Renault Vel Satis et Lancia Thesis se cassent le nez face à l’infernal trio d’Outre-Rhin. Sans oublier que quelques années plus tôt, Renault réalise une cascade de toute beauté avec la Safrane Biturbo. Trop lourde, trop complexe et trop chère malgré l’aide d’Irmscher et Hartge, la berline au losange ne s’écoule qu’à 806 exemplaires. Une certaine froideur va donc s’installer chez les constructeurs français.
Au début des années 2000, les V6 français plafonnent à 200 ch et n’osent pas aller plus loin. La grande berline aux chevrons ne dépassera jamais les 240ch dans sa version V6 3.0l… diesel (ES9 et L7X), quand les Allemands vont beaucoup plus haut. Alors, quand Peugeot arrive en 2002 avec la 607 Pescarolo, on frémit de plaisir. Rappelons au passage que la sage berline 607 de Peugeot fête ses trois ans au catalogue de la marque. Les ventes se portent bien mais elle est loin de faire l’unanimité au travers de son design mais aussi… aux travers de sa finition et de la palette des motorisations. Pour faire remonter l’intérêt autour de la berline, rien de mieux qu’une version bien badasse pour chercher les teutonnes.
La Peugeot 607 Pescarolo s’offre un V6 de 400 chevaux
Au Salon de Paris, le lion dévoile une berline complètement dingue, avec une plastique de la berline devenant bodybuildée dans sa teinte violine/noir. La carrosserie se montre beaucoup plus démonstrative grâce à ses larges épaules, ses ailes gonflées, ses pare-chocs qui se musclent, ses jantes à rayons qui impressionnent par leur diamètre (19 pouces) et sa double sorties arrière qui fait passer le message aux Allemands. Eh oui, en France aussi, on fait des berlines sportives. Le concept s’éloigne des acquis de la marque, moins discrète, très loin d’une certaine tradition bourgeoise de la marque (pour ne pas dire provinciale et notaire). Ainsi, la 607 de série, relativement discrète, sans agressivité et sans originalité, se métamorphose. Avec la Pescarolo, la berline fait l’inverse : c’est du brutal, à croire que le lion rugit à nouveau. La ligne transpire la sportivité, l’agressivité et la puissance.
Vous l’avez compris : avec la 607 Pescarolo, l’image de la berline aurait pu être différente si elle avait connu la série. Tout d’abord, son nom fait référence à la société « Pescarolo Automobiles », une entreprise d’Henri Pescarolo, spécialiste du Mans, et fait courir sous l’écurie Pescarolo Sport des Courage C60 à moteur… Peugeot en LMP2. Les chromes sont conservés afin de maintenir une certaine touche d’élégance : nous sommes encore très loin de la période black piano que nous connaissons.
Sous le capot, la marque installe le V6 ES9 qui délivre d’origine 3.0l pour 210 chevaux. On aurait pu rester relativement sur notre faim et on est un peu déçus (forcément). En face, Mercedes, BMW ou encore Audi proposent des motorisations supérieurs à 250 voire 270 chevaux. En série, la 607 ne fait pas le poids et se fait croquer par les allemandes. Toutefois, avec la 607 Pescarolo, la donne change. Le moteur V6 ES9 passe à 3,2 litres de cylindrées avec l’ajout de deux turbos. Le moteur ES9 devient donc un V6 biturbo, à l’image de la Safrane Biturbo. Ce moteur n’est pas inédit car il se retrouve déjà sous le capot de la Courage C60 du Mans. L’ensemble développe la bagatelle de 400ch. La lionne met donc une raclée aux berlines allemandes. La puissance est envoyée directement aux roues avant, avec 400ch sur le train avant ⏤ imaginez la perte d’adhérence.
Luxe, calme et cuir à bord
A bord, la lionne se la joue encore plus grand luxe. Le cuir de couleur prune s’étale dans tout l’habitacle. Bien dans son époque, on retrouve un ensemble vidéo dernier cri. Bon… pas d’écran tactile, mais tout de même un ordinateur de bord ! La française se la joue limousine de luxe, une configuration à bord que l’on retrouve presque à bord de la DS 9, apparue en 2020. On retrouve pour le reste l’ensemble du mobilier et les sièges de la Peugeot 607 de série. De quoi donner un coup de fouet à la gamme 607 ? Non. Car malgré l’envie de le voir commercialiser, le constructeur au lion n’ira pas plus loin que les moquettes des salons automobiles. D’ailleurs, on ne sait même pas si Peugeot avait, ne serait-ce une seconde, imaginé une version de série de la 607 Pescarolo. Plutôt que de relancer une carrière moribonde, la Pescarolo aurait apporté une version image plutôt que du volume. Pour rappel, la 607 n’a pas été un immense succès…
De toute manière, avec sa configuration traction avec 400ch, la conduite sans aide à la conduite allait être compliquée. Une lettre d’intention qui n’aboutira sur… rien. De toute manière, quelques années plus tard, le segment D vire à la déconfiture pour les constructeurs français. La 607 sera la seule à dépasser les 100 000 ventes, quand la Citroën C6 ne dépasse pas les 24 000 exemplaires et la Renault Vel Satis fait à peine mieux avec un peu moins de 63 000 exemplaires. Si Renault a lâché l’affaire sur le haut de gamme, seul Stellantis s’acharne avec le retour d’une grande berline avec la DS 9, mais aussi par Peugeot avec sa 508 PSE. Vous l’aurez compris, les Allemands peuvent encore dormir sur leur deux oreilles.
N.B : Suite à la publication de l’article, un proche de la marque m’a informé que la version présenté ne dispose que du V6 3.0l de 211ch. Au final, il n’existe aucune version de 400ch. On est déçu.
GALERIE
VIDEO
Via Peugeot, Wheelsage
Le pire ennemi de l’automobile française est la presse française, avez vous vu des automobiles française glorifiées sur la TV ?
Tradition française : dire du mal de nos constructeurs nationaux !