Après une première partie dédiée à la création de la petite italienne à retrouver ici, voici les suite et fin de l’histoire de la Fiat Uno.
Une voiture, deux carrosseries
Maintenant que le projet 144 dit Lambda de chez Lancia est récupéré par Fiat, ce dernier prend le nom de code 146. Outre une version trois portes, Italdesign doit également concevoir un modèle cinq portes. Le constructeur italien souhaite que les deux parties arrières soient différentes : la trois portes doit avoir la lunette arrière inclinée façon hatchback, tandis que la 5 portes doit être typée break avec une lunette arrière verticale.
Grâce à Car Design Archives, toujours à jour sur les infos, Giugiaro n’a jamais aimé s’entêter avec des dessins et des maquettes à l’échelle. Il les juge comme superflus et uniquement dédiés à de la communication et de la perte de temps ; ce qui ralentit les phases de conception réalisées avec son associé Aldo Mantovani. Lorsqu’ils ont acquis la confiance de leurs clients, ils brulent les étapes.
Les maquettes à l’échelle 1 en polystyrène avec deux côtés différents sont réalisées en seulement cinq semaines par les équipes d’Italdesign. Giugiaro, qui a brulé les étapes, est en mesure de présenter toutes les combinaisons possibles pour Fiat. En réalité, seules deux maquettes sont construites grandeur nature. Grâce à un jeu de modules astucieux, certaines parties (principalement l’arrière) peuvent être retirées et remplacées durant les présentations.
La Fiat Uno en 5 propositions
En 1979, ce sont cinq variantes qui sont présentées aux décideurs de Fiat, numérotées de zéro à quatre. À la fin de la journée, le choix s’arrête sur la proposition numéro quatre. Concernant la partie arrière, le directoire de Fiat décide d’attendre les essais en soufflerie avant d’arrêter son choix.
À côté de ça et en lien avec le Centro di Stile Fiat, ItalDesign conçoit l’intérieur avec deux maquettes en bois. Le premier est récupéré du projet initial de Lancia et le second est inédit. Il est basé sur la proposition de feu projet 143, soumise par Rodolfo Bonetto.
Au mois de février 1980, la maquette numéro quatre équipée des deux versions de pavillon passe les tests dans la soufflerie du Centre de Recherches de Fiat. Les chiffres sont excellents pour la période : la trois portes annonce un Cx de 0,334 et la 5 portes, encore mieux, de 0,323. Un petit écart de 1,1 qui impressionne puisque l’on sort à peine du second choc pétrolier. Après plusieurs tests avec leur lot de modifications au niveau du coefficient de traînée, la version cinq portes dite verticale est toujours meilleure.
Intégrer la Uno dans le Family Look
Dans le même temps, Italdesign construit à partir de la proposition finaliste deux nouvelles maquettes, cette fois en epowood et en plâtre recouverte d’un film Di-noc. Les maquettes sont soumises une nouvelle fois à Fiat au printemps 1980. Elle possède toujours deux côtés différents : trois et cinq portes. Fiat, plus que satisfait par les résultats en soufflerie, approuve la carrosserie dotée d’une lunette verticale. La Fiat Uno va aussi bénéficier de portes avant autoclaves qui englobent les montants du pare-brise.
À la suite de la seconde présentation, la ligne globale de Uno est arrêtée. Sauf que la face fait débat, il faut harmoniser le design de la face avec le reste de la gamme avec le « Family Look ». La Fiat Uno doit s’aligner sur le design de la récente Fiat Panda qui est arrivée trois ans plutôt. Le Centre de Style Fiat et Italdesign ébauchent pas moins de quatorze variantes.
Pour la face avant, les designers se passent de maquettes. Des retouches photo vont permettre d’imaginer la calandre et les blocs optiques. C’est l’idée de Mario Maioli avec ses barrettes en diagonale qui sont retenues. Selon Car Design Archives, le nombre de baguettes aurait fait débat chez l’italien : quatre ou cinq, comme le nombre de lettres qui compose le nom Fiat ?
La Fiat Uno est validée
Dès septembre 1980, le design extérieur de la voiture est approuvé définitivement. À la surprise générale, Giugiaro redessine la partie arrière afin d’aligner les feux et la forme du coffre. Ainsi, à la fin de l’année 1980, le style de la Uno est gelé. La marque Fiat peut lancer l’industrialisation (avec l’aide d’Alfredo Stola, aujourd’hui StudioTorino). L’intérieur est validé dans la foulée. La création de la voiture est désormais terminée.
La Uno arrive en janvier 1983
Début janvier 1983, la Fiat Uno est officiellement présentée à la presse. La présentation a lieu devant le monde entier à Cap Canaveral, directement sur le site de la NASA. L’image est forte : la Fiat Uno doit conquérir le monde et être conquérante. De plus, elle est d’office présentée en version trois et cinq portes. La gamme est dès le départ large (on va y revenir). Le lendemain, les concessionnaires de Fiat sont invités à découvrir la voiture, mais à Rome. Le rendez-vous a lieu au PalaLottomatica, construit pour les JO de Rome en 1960 (devenu le Palazzo Dello Sport en 2018).
Les Italiens auront droit à un accueil haut en couleur. Dans l’enceinte du bâtiment, tel un cheval de Troie, se dresse une Uno géante de laquelle sortiront les modèles de série. Ses dimensions sont sensationnelles : la voiture fait 15 mètres de haut, 17 mètres de large et les pneus atteignent 4 mètres de diamètre, tandis que les rétroviseurs font 2 mètres de long.
Elle s’adresse à tous
Dès son lancement en 1983, la palette des moteurs est vaste. Trois moteurs sont proposés : 0,9 l de 45 ch (la Uno 45), un 1,1 l de 55 ch et un 1,3 l de 68 ch (soit Uno 55 et 70). Les moteurs sont repris de la Fiat 127 et de la Ritmo. Il s’agit de 4 cylindres en ligne à 8 soupapes joints à une moderne boîte à 5 rapports, excepté le 0,9 l qui reçoit une boîte à 4 rapports. La Fiat Uno offre des performances honorables grâce à son poids plume de 700 kg et ses consommations de carburant faibles. La version 70 peut se targuer d’atteindre les 155 km/h en vitesse de pointe.
Côté finition, la Fiat Uno propose uniquement deux finitions : base et S (ou Super, selon les marchés). La S se démarque de la base par ses clignotants avant blancs et non oranges comme sur la version de base. La Uno met en avant son grand nuancier composé de quinze teintes. Les autres arguments comme les grandes surfaces vitrées, son excellente habitabilité et son prix font que le lancement est une réussite, au point où Fiat est obligée de mettre en place d’autres lignes de montage pour suivre la demande.
Fin 1983 : la gamme s’étoffe
Dès la fin de l’année 1983, deux nouvelles finitions s’ajoutent à la gamme existante : la ES et la Diesel. Comme son nom l’indique, il s’agit d’une version… diesel de 1,3 l de 45 ch partagée avec la Fiat 127. Elle dispose d’une boîte 5 vitesses qui lui permet d’être économique à défaut d’être puissante tout en étant plus coupleuse que le 68 ch. La version ES, pour Economy Saving, se base sur la Uno 45. Elle profite des recherches du constructeur pour économiser du carburant. Elle bénéficie d’enjoliveurs plats, d’un déflecteur sur le hayon, d’un économètre sur l’instrumentation du tableau de bord afin de connaître la consommation instantanée de la voiture. De plus, Magneti Marelli conçoit pour la Fiat Uno un allumage digital qui coupe le moteur après dix secondes sans sollicitation (l’ancêtre du Start&Stop), des pistons spécifiques qui augmentent le taux de compression et une boîte 5 à rapports longs.
En 1984, c’est la consécration pour le constructeur italien. La petite Uno gagne le prix de la voiture de l’année, au nez de la Peugeot 205. En Italie, la Uno est numéro une est des ventes et dans le Top 10 dans le reste de l’Europe. La même année, la Uno gagne une nouvelle version haut de gamme, la 70 SX, qui améliore la finition de la 70 S et une dotation plus riche. La SX profite d’antibrouillards et un spoiler de pare-chocs avant, des enjoliveurs agrémentés d’arche de roue et d’embout chromé pour l’échappement. L’intérieur gagne une montre digitale, des fauteuils en velours avec appuie-tête, une liseuse et un compte-tours.
La gamme évolue en douceur
En 1985, la petite puce italienne passe la barre du millionième exemplaire produit. La SX devient la SL, avec centralisation des portes, vitres électriques et teintées et est disponible avec l’ensemble des moteurs de la Uno. Apparaît également une finition sport Turbo IE, avec un moteur 105 ch dopé d’un Turbo IHI avec une injection électronique jetronic, accouplée avec un allumage électronique microplex et de freins à disque à l’arrière. Le moteur de la Fiat 127 disparaît et c’est le mythique Fire de 0,9 cm3 de 45 ch de la Lancia Y10 qui le remplace. La version ES, qui n’a pas séduit, disparaît de la gamme.
Seulement trois ans après sa sortie, la Fiat Uno dépasse les deux millions d’unités vendues. La gamme se diversifie encore avec la Turbo Diesel (des Fiat Ritmo et Lancia Prisma) équipée d’un turbo Garret T2. En 1987, la Uno gagne enfin une version à boîte automatique dite CVT. Son nom : la Fiat Uno Selecta. La transmission à variation continue n’est pas une inconnue, elle équipe aussi la Ford Fiesta. L’année suivante, le cap des trois millions est passé. Mais l’italienne prend de la bouteille et la Renault Clio va venir lui faire de l’ombre…
1990 : année zéro
Fiat décide enfin de rafraîchir la Uno en 1990. La face avant va être redessinée et adopte le nouveau langage de la marque et se rapproche de la très (trop) moderne Fiat Tipo, apparue en 1988. La voiture reçoit une nouvelle calandre, des nouveaux feux, des pare-chocs couleur carrosserie. La Uno adopte aussi des antibrouillards et le hayon est revu. L’intérieur est modifié avec une nouvelle planche de bord et de nouveaux sièges avec de nouveaux revêtements. La gamme de moteurs adopte le Fire dans différentes puissances. Selon les versions, la Uno adopte une barre antiroulis.
La Uno va connaître de nouvelles modifications en 1993 avec l’évolution des normes antipollution par l’adoption d’un pot catalyseur sur toutes les motorisations. Les ventes résistent grâce à de nombreuses séries limitées. Dans le même temps, Fiat dévoile la nouvelle Punto, qui ne chasse pour autant pas la vénérable italienne. La Fiat Uno va devenir l’offre d’entrée de gamme du constructeur et va cohabiter avec la Punto. Cependant, les versions hautes et la Turbo I.E quittent le catalogue.
En février 1994, la messe est dite et la Uno disparaît en Europe. Plus de 6 272 796 exemplaires auront été écoulés. C’est l’une des meilleures ventes de la marque de Turin, mais elle ne va pas prendre pour autant sa retraite. La Fiat Uno va poursuivre sa carrière en Amérique du Sud où elle prendra enfin sa retraite en 2013. Devenue là-bas la Fiat Mille, elle s’écoulera dans le monde à un peu moins de 11 000 000 d’exemplaires.
Le Cas Fiat Uno Turbo IE
En 1985, Fiat dévoile une Uno bien énervée avec une injection électronique dérivée de la Fiat X1/9 et un turbo IHI. Le châssis est rabaissé de 4 centimètres, et le bloc est celui de la Fiat Ritmo de 1 300 cm3. La boîte de vitesse est également reprise de la Ritmo. Le tout délivre 105 ch et 200 km/h de vitesse de pointe et abat le 0 à 100 km/h en seulement 8 secondes. Pour la sécurité apparaissent quatre freins à disque, des pneumatiques élargis en 175/60 et des jantes alliage et un kit carrosserie accompagnent le look sport de la citadine. L’italienne avait les arguments pour aller chercher les Renault Supercinq GT Turbo et Peugeot 205 GTi, mis à part son comportement de caisson à savon. Avec les nouvelles normes antipollution, la Turbo I.E reçoit en 1987 un catalyseur qui fait perdre 5 ch au moteur, mais culmine à 100 ch.
En 1990, la Fiat Uno Turbo I.E change de moteur et reçoit un nouveau moteur 1.3l de 118 ch. Les performances s’améliorent et la voiture adopte enfin une barre antiroulis de série.
L’Avis des Cylindres :
La Fiat Uno a disparu de nos routes, par la rouille, mais aussi les primes. Pourtant, elle conserve de beaux restes comme la tonitruante version Turbo I.E. Pas de soucis électroniques particuliers, on surveillera la rouille sur les ailes et le châssis. Avec l’état des pièces, il devient compliqué de mettre la main dessus.
Côté tarif, à l’instar de la Citroën Visa, les exemplaires fatigués se trouvent dès 250€ ou 1 000€ pour une roulante nécessitant des frais importants. Quel que soit le kilométrage, la Fiat Uno reste abordable. La Turbo débute à 12 000 € avec plus de 150 000 kilomètres. Un exemplaire de Turbo proche du neuf et avec moins de 100 000 kilomètres réclame minimum 16 500 €. On fera attention à son entretien et surtout la boîte ou le niveau d’huile. La version sportive peut parfois être mal traitée. Un entretien récurrent et un historique suivi sont un plus.
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