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Dans le design automobile on pense tout d’abord aux lignes et aux formes des voitures, c’est vrai, il y a aussi une étape clé à prendre en compte : les maquettes et surtout la maquette en clay. Dans cette série sur la création automobile, on a envie de revenir sur l’étape deux, c’est-à-dire le passage du dessin à la forme dans l’espace.

De la feuille à la maquette

Evidemment avant de faire une maquette, peu importe l’échelle que ce soit à 1:43, 1:18 voire échelle 1. Le designer à réfléchit et travailler les formes de son modèle sur le papier ou sur sa tablette graphique. Que ce soit sur papier ou sur ordinateur, personne ne peut se rendre compte de la véritable forme d’un objet. Le papier n’a pas le même rendu qu’une vue en 3D. C’est ainsi que la clay entre en action. Au sein d’un bureau d’étude d’un constructeur, il y a l’équipe de designer et les maquettistes. Ces derniers utilisent alors une matière très simple : la clay.

La clay permet de donner un peu de corps à un croquis. On découvre les reliefs des voitures, les jeux de lumières, la réflexion de la lumière voire même les défauts du prototype. c’est l’occasion pour le designer de reprendre certains détails mais aussi de valider des formes avec l’aide du maquettiste et de l’équipe de design.

Clay et design
Aujourd’hui on dessine encore mais sur tablette, mais il y a 50 ans c’était aux crayons et aux feutres

La clay : la 3D de l’automobile depuis plus d’un siècle

L’usage de la clay vient d’un homme, Harley J. Earl. un homme visionnaire, dont son intuition est révolutionnaire dans le domaine automobile, à plus d’un titre, pour l’usage de l’argile ou clay mais pas seulement. Il interviendra pour l’entrée des femmes dans le domaine automobile. Depuis plus d’un siècle, l’argile est utilisé dans l’automobile pour donner corps au projet et façonner le projet définitif.

C’est en 1926 que Harley va tester sa technique avec une commande de la part de la marque Lasalle – encore aujourd’hui on parle de la méthode Earl. La technique va s’imposer dans l’ensemble des bureaux des marques automobiles.

La maquette à l’échelle 1:1 construite à partir de clay est à ce jour l’unique support qui permet de discuter, d’échanger autour du projet et surtout cette maquette devient ce que l’on appelle le « référent » pour la suite du projet et donc sa validation.

Du dessin au numérique

Si depuis quelques années le numérique à pris le dessus, grâce à un gain de temps, la maquette en clay reste le meilleur support dans l’intégralité des studios du monde. Dans la plus part des dossiers de presse des constructeurs ou encore dans leur archives, on découvre avec plaisir les échanges autour des maquettes, le travail de sculptures, etc.

Alors, je vous vois venir, non c’est pas une tonne de clay qui sont utilisés pour travaillé la voiture, il y a un moule en dessous – généralement en nid d’abeille -, voire une structure en bois ou en mousse à base de polystyrène, le sculpteur vient avec ces outils oeuvrer sur la matière inerte. Pour un rendu le plus proche de la réalité, un film gris est déposé sur la clay.

L’argile étant tout de même couteux : l’épaisseur de la structeur ne dépasse pas les deux centimètres, tandis que la clay s’applique sur une épaisseur de cinq centimètres. On parle alors de l’opération de massage : l’argile est chauffée et massée pour obtenir la forme désirée. On parle aussi de fraisage pour le plus gros des formes et de sculpture pour les détails. selon la forme cela peut vous occuper d’un voire plusieurs jours, de jour comme de nuit.

Malgré l’arrivée du numérique, la maquette à l’échelle 1 reste une meilleure vision du produit

Le numérique en concurrence

Le numérique permet de faire certaines avancées, économique et surtout de temps. Je ne suis pas assez connaisseur du sujet pour rejeté le numérique dans la conception automobile et vous dire « de l’argile ou rien » – le numérique à un gros avantage que n’a pas la clay : avoir des éléments de la voiture de manière très détaillé comme l’intérieur d’un phare, une poignée ou entre un pli de carrosserie. Ainsi en 2008, Lancia dévoile la Delta de troisième génération conçu dès 2006 en seulement 15 mois et uniquement grâce aux logiciels de conception numérique.

Le coût du numérique est élevé, ainsi son utilisation révèle des coûts proche d’un film d’animation. L’inconvénient du numérique est de ne pas percevoir véritablement les masses, d’ici les prochaines années ceci devrait changer avec l’arriver des lunettes 3D et de la réalité augmentée. De nombreuses marques mêle ainsi depuis plusieurs années, le numérique et les maquettes.

Clay et design
Dès 2006, la Lancia Delta III est conçue numériquement sans aucune maquette, il s’agit d’une première mondiale

Les Maquettistes, artistes des formes

Pour concevoir notre maquette, ce n’est pas une seule personne qui va se contenter de faire tout le véhicule : il s’agit d’une équipe de trois ou quatre personnes qui investit la clay et applique tout son savoir-faire à la forme. Aidé par l’équipe de designer pour échanger mais aussi la faire évoluer selon les demandes des équipes du style ou de soucis techniques. Une seule maquette peut demander plusieurs mois de travail. De plus le poids d’une maquette en clay est lourd : près de 2,0 tonnes (tout modèles confondu). La quantité de clay utilisée chaque année par une marques est gargantuesque : près de 90 tonnes (chiffres : Lignes Auto).

L’argile : une matière organique

Selon le sculpteur ou encore selon les procédés de la marque, le rapport à la matière est différent. Cette variation, ce joue sur la manière de travailler la matière : chaud ou à froid. Chez les asiatiques, l’argile n’était pas chauffée et se travaille différemment que chez les constructeurs européens qui la chauffe avant de l’appliquer.

Si vous avez déjà travailler la clay lors de poterie ou dans d’autres cas (façon ghost en charmante compagnie), la clay offre des sensations olfactives très différentes de l’une à l’autre. Selon le type de clay utilisé la couleur varie. Ainsi la filiale russe de Renault dispose d’une clay noire tandis que Renault France, utilise une argile caramel.

En préparant cet article, nos confrères de Lignes Auto, nous apprend que pendant très longtemps les constructeurs tricolores, ont travaillés les maquettes avec du plâtres voire faire les maquettes en bois – même si cette option était plutôt fait une fois les lignes définitives validés en interne – revenons au plâtre qui fut aussi utilisé en Italie et particulièrement chez les grands carrossiers et qui perdura jusqu’en 2001 avec le concept Citroën Osée par Pininfarina. Chez Renault, le plâtre disparu au début des années 1990 avec le concept Ludo. C’est Patrick Le Quément imposa la clay à Boulogne-Billancourt.

La Clay n’a pas que des avantages. Tout comme le bois, l’argile travaille et ne se conserve pas. En plus d’être assez tendre, elle est très fragile et il vaut mieux éviter de la toucher au risque de la déformer. La clay peut également provoquer des bulles avec lesquelles il faut se battre et la retravailler.

La plus part des constructeurs en profitent aussi pour peindre la clay après l’usage d’une pellicule de polyuréthane, ce qui demandera un petit passage au four pour la faire sécher.

Le Dynoc : la robe de la clay

Voilà vous avez sculpter votre carrosserie définitive, la forme vous plait. Pour lui donner l’apparence d’une vraie carrosserie ; vous appliquez une peinture ou plutôt un film sur la clay; cette couche gris aluminium ou inox, à un petit nom : le Dynoc. Cette pellicule autocollante sous la forme d’un rouleau s’applique comme du papier peint, qu’il suffit de tremper dans de l’eau à la température de 60 degrés. Il est ensuite marouflé avec une spatule, en évitant de conserver les bulles et la lumière va se reflété dessus, laissant apparaître les lignes.

Le Dynoc s’applique une fois la maquette en clay réalisé

L’outillage

Sans outils, rien n’est vraiment possible. Il suffit d’un couteau sobrement nommé le crayon du maquettiste, d’un fin ruban d’adhésif et surtout de ses yeux. On retrouve aussi les outils des sculpteurs plus « classique » comme les « mirettes« . Le maquettiste automobile profite aussi d’outils spécifique comme les « clinquants » ou encore des « lisses« , de grandes réglettes de tôle avec ou sans dents qui définissent les formes et les surfaces.

La nature ayant horreur du vide, l’automobile à horreur du plat (!), il faut toujours un minimum de volume et de forme. Les Clinquants existent avec autant de formes que de volumes : concave, court, courbés, etc.

Au final, le numérique est arrivé dans les bureaux de conception, sans forcément avoir fait oublier la bonne vieille maquette en clay qui permet toujours et encore de définitif et valider les formes d’un prototype.

VIDEO

Guillaume Pina

Passionné par l'automobile depuis tout petit, j'adore l'automobile ancienne, mais aussi les plus récentes. Je m'intéresse tout particulièrement au design des voitures, les anecdotes autour de leur conception et encore plus quand elles ont fait un flop !