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Audi 50 : la vie n’est pas toujours facile (1974-1978)

Audi 50 : la vie n'est pas toujours facile (1974-1978)

La vie n’est pas toujours facile, surtout quand on s’appelle Audi 50. Bien avant sa sortie, Volkswagen lance un grand plan d’achat. À la manière d’ « une confession d’un acheteur compulsif », la marque allemande rachète ses concurrents dont Auto-Union et NSU. L’achat pas vraiment compulsif permet à la marque aux anneaux de sortir une charmante citadine haut de gamme, qui rencontre un joli succès. Malheureusement, l’Audi va voir sa carrière s’arrêter net, comme une star de télé-réalité. Après seulement quatre ans de commercialisation, la starlette termine mal. Une histoire qui sent le pneus brûlé et non la drogue.

Volkswagen fait les magasins

À la fin des années 1960, Volkswagen fait les magasins en agrandissant son portefeuille de marques en commençant par s’offrir Auto-Union, en 1964, ou plutôt débarrassant Mercedes du canard boiteux et de l’usine d’Ingolstadt, en Bavière. Quelques années plus tard, Volkswagen met la main sur la brillante marque NSU et surtout sur son bureau d’études, foisonnant d’idées (la fameuse R&D). L’idée de base pour Volkswagen est de racheter ses concurrents, de préférence les canards boiteux avec l’intention de mettre en avant sa fameuse Coccinelle et limitant la concurrence sur le même créneau.

Les années 1970 démarrent sous les meilleurs auspices pour Auto-Union. L’entreprise trop connotée IIIe Reich et passion moustache (si vous voyez ce que je veux dire) et est née du partenariat entre quatre marques pas au mieux de leur forme (Horch, DKW, Wanderer et Audi). Volkswagen a alors besoin d’une usine et flaire le bon filon et se disant que désormais Auto-Union était mal vue et que sa fin était proche. Autant y mettre un dernier coup de carabine, reprendre l’usine d’Ingolstadt et emballez, c’est pesé ! Pourtant, chez Volkswagen, on se dit que le destin de la marque pourrait être tout autre et qu’il y aurait moyen de se diversifier avec des modèles plus haut de gamme. On dégage Auto-Union, dissoute au plus grand bonheur des soviétiques, et on ressort du placard Audi. L’histoire est plus complexe mais ce n’est pas le sujet. Après être tombée dans l’escarcelle de Mercedes en 1957, Auto-Union déménage en Bavière et Volkswagen reprend le flambeau. La marque au V veut de la dissolution d’Auto-Union concevoir deux marques distinctes et plutôt haut de gamme…

Petite révolution chez Audi, on ose la citadine à partir d’un ancien projet NSU.

Audi va s’occuper des modèles bourgeois et de standing (des Volkswagen de luxe), tandis qu’on ressort du formol Horch pour en faire un concurrent allemand de Bentley et Rolls-Royce. Entre temps, les Allemands et les Anglais discutent du rachat de Bentley qui n’aboutit pas, et Horch repart direction les livres d’histoires. Désormais, seule Audi affiche les fameux quatre anneaux. En 1969, Volkswagen met la main sur NSU et le fusionne avec Audi pour donner naissance à Audi NSU Auto-Union AG (rien que ça). Audi va profiter de l’expertise de NSU avec son fabuleux bureau d’étude et de style, mais aussi Volkswagen qui profitera du rachat pour passer à la traction avec la confidentielle Volkswagen K70, échec puissant mais ouvrant la voie à la Volkswagen Passat et surtout la première Audi 80. Car avant NSU, les premières Audi de l’ère Volkswagen sont chiantes à mourir et pas plus intéressantes que le duo haut de gamme de l’époque : BMW et Mercedes.

En réalité, ce revirement est simple. Comptant un peu trop sur la monoculture avec la Coccinelle mais aussi au tout à l’arrière, Volkswagen ne prend pas le virage de la traction. Cette décision met le groupe dans la tourmente et les caisses sont vides. Aussi, pour s’en sortir, Volkswagen doit s’appuyer sur ses nouvelles marques et surtout NSU maîtrisant la technologie de la traction. Bref, le groupe nourrit en secret l’intention de monter en gamme avec Audi et de s’attaquer aux prestigieuses marques anglaises et italiennes (Jaguar, mais aussi Lancia). Ce nouveau vent d’air frais permet aussi à Volkswagen de compter sur NSU pour le développement d’une certaine Golf avant de s’attaquer au projet de l’Audi 50. Car oui, je n’ai pas précisé, mais la marque NSU disparaît.

Elle est contente, elle n’a pas hésité entre l’élitiste Audi et la Polo, plus accessible mais moins puissante et confortable.

L’Audi 50, un projet NSU

Audi et NSU, désormais regroupés sous le même label, travaillent à partir de 1972 sur le projet d’une petite citadine. Les rôles n’étant pas totalement définis sur les tâches de chacun, c’est donc Audi/NSU qui réfléchissent à la petite voiture. En même temps, pas totalement déconnant, la marque peut s’attaquer à Autobianchi et son A112. Cela tombe bien, car Audi ne part pas d’une feuille blanche. En effet, NSU conçoit justement avant le rachat une petite berline économique en vue du remplacement de la Prinz et son moteur arrière. N’oublions pas qu’Audi vient de perdre la NSU K70 pour ne pas cannibaliser les récentes Audi 100 et 80. C’est ainsi que le 26 octobre 1974, au Salon de Francfort apparaît la petite Audi 50.

La petite allemande arrive en concession au bon moment, puisque le monde se remet du premier choc pétrolier de 1973, pour être confronté au second choc à partir de 1977. Le timing est « excellent » pour sortir une voiture légère et qui consomme peu avec un certain raffinement. Ce qui a réussi à l’italienne avec Autobianchi réussira donc à l’allemande. N’oublions pas que le segment des « petites » s’élargit avec l’arrivée des Volkswagen Golf, Renault 5, Fiat 126 ou encore Peugeot 104.

L’intérieur se montre confortable et spacieux avec des sièges plus enveloppants et épais que sur la Polo. La finition sérieuse profite de placage imitation bois, pour vous rappeler que vous êtes à bord d’une Audi, tout de même. L’équipement est à la hauteur du blason avec le starter automatique ou encore les freins à disques, lorsque la Polo ne propose que des freins à tambours et un starter manuel. Le mobilier paraît austère presque uniforme et sans parti-pris. Lisse à l’intérieur comme à l’extérieur, la petite Audi ne froisse personne et cela à un avantage sur lequel nous allons revenir un peu plus tard…

Chic, la sellerie profite de velours et de contre-porte en simili-cuir.

Le grand Gandini et la petite Audi

Le dessin de l’Audi 50 est signé par le maître Marcello Gandini qui officie à l’époque chez Bertone ainsi que par Claus Luthe. Classique, les lignes sont équilibrées tout en s’inspirant de la récente Audi 80. On retrouve le regard de l’Audi 80, un petit pare-chocs chromé agrémenté de capuchon en caoutchouc aux extrémités mais aussi des flancs lisses aux larges surfaces vitrées, idéales pour la ville. L’arrière est sans surprise avec un air de mini Golf doté d’un hayon. On a connu plus inspiré dans le domaine du design, mais ce n’est pas le but d’Audi qui reste droit dans ses bottes. N’oublions pas son nuancier flashy complètement dans son époque avec des teintes jaunes, oranges ou encore vert. Très lions de l’austère Audi A1 actuelle ; j’dis ça, j’dis rien.

Le succès de l’Audi 50 est immédiat. Plus grande que l’A112 avec 3,51 m, l’Audi permet de séduire une nouvelle clientèle. Au point que Volkswagen se dit « Tiens, c’est pas mal, et si on la rebadgeait ? » Boom, 1975 marque la naissance d’une fourmi : la Volkswagen Polo. Ceci permet à chacun des constructeurs de proposer une citadine et tout le monde y trouve son compte ; de la citadine basique et robuste chez Volkswagen à la chic et luxueuse citadine chez Audi. La 50 et sa jumelle la Polo permettent clairement de comprendre les directions que vont prendre Vévé et Audi : populaire chez Volkswagen et haut de gamme chez Audi, deux chemins complètement différents mais complémentaires.

Sous le capot, la plus petite des Audi embarque deux moteurs et deux niveaux de finition. Le premier moteur quatre cylindres en ligne de 1 093 cm3 offre 50 chevaux avec la finition LS. La version haut de gamme, représentée par la GL, arrive un peu plus tard dans la vie de l’Audi 50, avec un 4 cylindres 1 272 cm3 de 60ch. Reste que la fiche technique fait qu’elle sort au bon moment en pleine crise du pétrole, grâce à son poids ! La petite voiture affiche un poids svelte avec seulement 685 kilos. Soit à peine 150 kg de plus qu’une Citroën Ami actuelle.

Volkwagen vs Audi, le destin tragique de la 50

La petite Audi n’a pas eu le temps de bien prendre ses marques que Volkswagen récupère directement les caisses pour faire sa Polo. Octobre 1974 pour l’Audi et mars 1975 pour la Polo. Des jumelles qui ne se marchent pas dessus mais esthétiquement trop proches sûrement pour le directoire Volkswagen, ce dernier décide après seulement quatre ans de carrière d’arrêter la 50. La Polo plus bas de gamme offre en entrée de gamme un petit moteur 1.0l de 40ch dont le seul argument est son prix plus bas. Les ventes de l’Audi baissent et en 1976 la gamme est réorganisée. La LS reste l’entrée de gamme mais propose en option le bloc de 60ch, tandis que la GL laisse la place à la GLS. L’année suivante, un nouveau bloc 1,3 60ch arrive mais il gagne en couple à défaut de chevaux.

À la fin des années 1970, Volkswagen met en place sa stratégie autour de ses marques. Audi s’occupe des modèles haut de gamme et Volkswagen des entrée et moyenne gammes. L’Audi 50 n’a plus aucun intérêt et, malgré un facelift au programme, ce dernier est tout simplement annulé. La Polo rencontre son public et n’a aucun intérêt de s’en priver. La carrière de la fourmi ne fait pourtant pas d’ombre à l’Audi, mais il faut parfois faire des choix dans la vie…

L’Audi 50 ne disparaît pas à cause d’un flop, ni même par cannibalisation de la VW Polo mais simplement par ce que la marque n’est pas dans le registre dans lequel on attend une marque haut de gamme, malgré le succès de la petite citadine. La voiture disparaît en juillet 1978 des chaînes des usines de Wolfsburg et de Neckarsulm, après 180 812 exemplaires. Une vie pas si facile, qui en dit long sur le silence radio de la marque Audi au sujet de la 50 et surtout le retour de la marque dans les petites voitures avec l’Audi A2 (2000) avec sa coque en aluminium, dont le naufrage industriel est un exemple scolaire. En 2007, Audi retente l’aventure avec le concept Audi Metroproject Quattro, pour prendre la température et en 2010 l’Audi A1 de série débarque avec un joli succès.

Félicitons Marcello Gandini (Bertone) et Claus Luthe pour le travail fin du design de l’Audi 50.

L’Avis des Cylindres :

Dégotter ce petit bolide est comparable à une aiguille dans une botte de foin : bon courage ! L’une des plus petite Audi de l’histoire est comme beaucoup, mais vraiment beaucoup de voitures de l’époque, biodégradable et recyclable : en cause, l’acier recyclé a du cuivre qui rouille et transforme la voiture en dentelle. Cela touche pratiquement tous les modèles sans exception.

L’avantage, malgré sa relative rareté, c’est que les pièces se trouvent encore facilement grâce… à des revendeurs spécialistes du groupe VW et de la Polo. Bref, autant de raisons de bien surveiller l’état général de la caisse, du châssis ou encore du plancher. Car l’allemande rouille aussi vite… que les italiennes ou encore la Renault 5.

Côté prix, vu la rareté, les exemplaires sont rares et la cote tourne autour des… je n’ai pas de cote car je n’en ai pas trouvé… ! Mais avant le prix, surveillez bien l’état de la voiture, seul argument pour éviter les ennuis.

Spacieuse, on pouvait même y mettre sa petite amie (et elle semblait contente).

Le Cylindre en + :

Production : 1974-1978, Wolksbug, Neckarsulm
Dimension : 3 526 x 1 559 x 1334 mm (Lxlxh)
Carrosserie : berline 3 portes, coque autoporteuse
Moteurs : 4 cylindres en ligne, 50 et 60ch — position transversal avant droit
Transmission : traction avec boite manuelle 4 rapports
Poids : 685kg
Exemplaires : 180 812 exemplaires
Jumelle : Volkswagen Polo

GALERIE

VIDEO

Via Audi, WheelsAge, Dauphiné Libéré (Nicolas Laperruque)

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