Il fallait bien parler du Renault Avantime un jour, véritable ORNI* sur les routes, celui qui devait redéfinir les codes du luxe chez Renault aura été un échec cuisant pour la marque au losange. L’Avantime aurait dû être le pendant haut-de-gamme de l’Espace dans une formule unique : le monospace-coupé. Revue d’un échec que personne n’a (ou voulu) vu venir.
*Objet Roulant Non Identifié
Avantime ou Aftertime ?
Avec son design singulier, le monospace-coupé Renault ne rentre véritablement dans une aucune casse du marché automobile. Voulu par la marque comme censé chapeauter le Renault Espace, son look décalé et ses détracteurs ne l’ont pas aidé avec son sobriquet : Aftertime. N’oublions pas que nous sommes dans une période prolifique au début des années 2000, où les constructeurs généralistes se cherchent dans le haut de gamme avec les Citroën C6, Lancia Thesis, Volkswagen Phaeton et surtout chez Renault la Vel Satis. Finalement, le Renault Avantime paraît réussi tant la Renault Vel Satis surprend et consterne le secteur, même 20 ans après sa sortie. Evidemment, le design hors du commun du monospace-coupé n’a pas rencontré le succès. Au point qu’aujourd’hui, sa robe atypique connait un regain d’intérêt. Finalement, l’Avantime avait 20 ans d’avance.
Du monospace populaire au monospace premium
Le nouvel Renault Espace III apparaît lors du Salon de l’automobile de Paris en 1996. Pourtant, chez Matra, l’esprit n’est pas à la fête (vous pouvez ranger les cotillons). En effet, Renault annonce qu’il fabriquera lui-même le futur Espace IV. En sous-production, Renault veut remplir ses usines au détriment de Matra. La marque de Romorantin doit trouver une solution rapidement, sa survie en dépend. Matra va se mettre au travail et réfléchir à un modèle qui doit remplacer d’ici 5 ans le monospace Renault. Un soir le bureau d’étude a trouvé la solution : conserver la plate-forme de l’Espace et créer un nouveau véhicule plus haut de gamme.
Ce nouveau véhicule qui partagera sa plate-forme de monospace doit être résolument haut-de-gamme. En effet, ce dernier doit prendre en compte que la clientèle visée est habituée du monospace et que ces derniers ont avancé dans la vie : les enfants ont grandi, ils ont du temps libre et de l’argent. De plus, Bernard et Marie-Claude ont besoin d’un engin surélevé (on ne parle pas encore de SUV, la mode n’est pas encore là), ils adorent partir en week-end et aller chiner chez leurs brocanteurs favoris. Pas de revival du Rancho, non, chez Matra on se dit que la bonne idée est de prendre un Espace et de lui retirer deux portes : le monospace-coupé est né.
C’est Thierry Metroz, aujourd’hui chez DS Automobiles, qui sort ces plus jolis crayons, ses feuilles et conçoit un projet atypique et futuriste. Une structure en aluminium se superpose au châssis de l’Espace III. Ce choix permet de faire baisser le centre de gravité du véhicule. La carrosserie, elle, mêle éléments en aluminium et synthétique.
Une conception complexe
Le Renault Avantime est savant mélange d’éléments techniques et d’influences diverses. Sa gestation est des plus compliquées : le montant latéral et central est gommé, on y place un toit panoramique ouvrant immense… Tout est fait pour donner l’impression que l’on se déplace dans un cabriolet quand le toit et les fenêtres sont ouvertes. Une formidable idée qui parait impensable dans la réalité pour la structure ou de l’étanchéité et, pourtant, Matra y arrive. Elle ne s’arrête pas là, prête à relever tous les défis possibles : la marque réfléchit alors à l’ouverture des portes. Les portières, réduites aux nombres de deux, sont immenses. Il faut dégager au maximum l’accès aux assisses pour que l’angle d’ouverture prenne un minimum de place. Résultat, les portières sont conçues autour d’une articulation complexe et plutôt lourde. De plus, Matra est confrontée à un autre problème : ce système entraine un léger surpoids pour les portières avec 55 kilos chacune.
Les premiers essais des modèles de présérie réalisés par la presse dès le printemps 2001 démontrent que les imposants sièges sont lourds et difficiles à rabattre. Les bruits aérodynamiques sont présents. Vous pensiez que c’était tout ? Amateurs ! Rajoutez-y le manque de rigidité… et hop ! les ingénieurs ont doté l’Avantime d’imposants renforts de structure qui occupent le volume dédié aux passagers ainsi que dans le coffre… Du coup, le seuil de coffre est haut, empêchant le changement d’objets volumineux. Désolé, mais une horloge comtoise ne rentrera pas dedans, tout comme l’armoire normande que l’on vient de trouver à la brocante du dimanche. Face à tous ces défauts, l’Avantime reprend la route des ateliers Matra et Renault pour être amélioré !
Un concept annonciateur
Lors du Salon de l’automobile de Genève 1999, Renault annonce l’arrivée de l’Avantime via un concept-car. La marque au losange annonce la sortie de l’Avantime dès l’année suivante. Avec une conception très longue et complexe, il faudra deux années de plus. Dans le même temps, Renault termine la conception de la remplaçante de la Safrane : l’improbable Renault Vel Satis. Reprenant d’ailleurs certains codes de l’Avantime avec sa forme monovolume. Sentant sûrement une sorte de coup-bas venant de la part du constructeur au losange avec la Vel Satis, le Renault Avantime s’expose en présérie dès le salon de Paris 2000.
2002 : l’odyssée du Renault Avantime
C’est finalement en 2002 que l’odyssée du Renault Avantime débute avec des débuts encourageants. Il faut dire que l’engin suscite la curiosité. Son design est plus intéressant que la grande Renault Vel Satis, très clivante. Techniquement, sous le capot l’on retrouve un V6 essence et diesel. Tandis que la boîte de vitesse est manuelle, pas de boîte automatique, y compris dans les offres haut de gamme. Le résultat est à son tour clivant et décalé par son offre et une finition désastreuse s’affichant à un tarif relativement élevé : débutant à 40 735 €, soit plus de 52 000 € actuels.
La surprise de l’Avantime est son immense surface vitrée : le pare-brise avant est en trois parties, les vitres latérales sont toutes ouvrantes et cerise sur le gâteau un toit ouvrant panoramique aux dimensions record : 1,7 m². Dans les mois qui ont suivi le lancement de l’Avantime, la gamme s’étoffe par le bas avec une version d’entrée de gamme dotée par un 2.0l de 165 ch en version Expression, suivie d’un 2.2l Dci de 150 ch. La marque au losange essaye de réduire au maximum le tarif et lance des finitions plus accessibles : Expression et Dynamique. La Privilège est plus haut-de-gamme.
Un lacement en retard
La gamme est complète et répond à toutes les demandes. Cependant, l’Avantime va rencontrer une ennemie de l’intérieur qui va lui être rapidement fatale qui pointe son capot dès la fin de l’année 2002 : le nouvel Espace IV. Le design du nouveau monospace conçu et imaginé en interne par Renault adopte les dernières technologies de la marque au losange. L’Avantime prend une claque. Pour se rattraper, Matra tente de faire parler du coupé-space par le biais d’une série spéciale : l’Hélios. Basé sur la finition Expression, il est doté du système Grand Air et donc du toit panoramique sans avoir le V6. Mi-figue, mi-raisin, l’Avantime Hélios perd les feux Xénon et la climatisation automatique.
Quelques mois seulement après son lancement, au printemps 2003, l’aventure du Renault Avantime prend fin, après seulement 8 512 exemplaires produits. Très loin des 15 000 exemplaires prévus initialement. C’est évidemment un échec : personne n’a compris le concept. Dans le même temps, Renault dispose d’une offre qui se cannibalise avec l’Espace. Qui offre d’avantage d’espace et vendu moins chère, la grande Vel Satis qui surfe sur le même principe que l’Avantime avec son style monocorps. L’Avantime était trop proche de l’Espace, tout en étant plus chère et pas forcément plus pratique par des choix techniques discutables voir économiques.
L’Avis des Cylindres :
Le Renault Avantime est un spécimen unique dans le monde de l’automobile. À plus d’un titre, il a été l’unique représentant de son segment et surtout il a été considéré collector avant même sa disparition du catalogue Renault. On trouve des Avantime en bon état voire proche du neuf. L’on peut dire qu’il a plutôt été bien conservé par ses propriétaires. Si le modèle en lui-même est particulier, c’est le choix de la motorisation et des équipements qui n’est pas anodin. Ce n’est pas peu dire car sous le capot de l’Avantime, il y a du choix : plus de 4 000 exemplaires de V6. L’autre argument, c’est aussi la palette de couleurs.
Ainsi, trois teintes se démarque dans le lot : il n’y a que six exemplaires en vert Taïga et encore, plus rare, les gris Pluton et Sirius avec seulement deux exemplaires de chaque. Au registre des raretés du monospace-coupé, on note le pack cuir étendu « Pack Exception » ou PE1 sur 141 exemplaires. Moins rare, le PE2 qui concerne 536 exemplaires, avec les panneaux de porte sont revêtus de cuir. Il y a ainsi des versions qui sont véritablement des Graals.
En diesel, l’Avantime doté du 2.2l dCi est relativement accessible : comptez un minimum de 3 000 € avec 200 000 kilomètres. Le V6 est accessible dès 6 000 € avec un fort kilométrage. Moins le kilométrage est haut, plus le tarif augmente. Certains exemplaires dépassent les 12 000 € par leurs options, les teintes et le faible kilométrage.
Concernant la fiabilité de la bête, peu de bug de la part de l’électronique puisque le Renault Avantime n’a pas bénéficié de certains équipements qui ont gâché la vie de la Vel Satis et de l’Espace IV. Attention à la vanne EGR sur le diesel, tout comme le turbo, les bobines d’allumage et la courroie de distribution. Dernier point de détail, les éléments de carrosserie deviennent rares… Si la ligne vous fait craquer, prenez le temps de trouver l’unique coupé-space qui est fait pour vous !