Non, nous n’allons pas encore aborder le sujet du Titanic du losange, la bien nommée berline haut de gamme Renault Vel Satis. Nous remontons le temps pour revenir en 1998, pour évoquer le signe annonciateur du désastre : le concept-car Vel Satis. Ce premier concept permet une véritable rupture dans le style Renault. Se plaçant entre le mythique concept Fiftie, évoquant la 4CV et l’anachronique concept du coupé-space : l’Avantime (1999). Une tragédie en trois actes.
Constat : et si Renault montait en gamme ?
Renault a toujours réussi à s’en sortir sur le créneau du haut de gamme, enfin presque. Dans les années 50, la Frégate coule à pic avec son design particulier, sa fiabilité désastreuse et en fin de carrière subit la concurrence allemande, italienne et finie dégommée par les bourgeois français au profit de la Citroën DS. Heureusement, le losange s’en sort bien à partir de 1965 avec la moderne et surprenante Renault 16. Suivi du duo R20 et R30 et son apogée par la grande berline R25. Sans oublié, la Renault Fuego qui joue les coupés GT malgré son manque de succès lié à l’absence de gros moteur. Le constructeur au losange sans que l’hégémonie des berlines allemandes parasite le succès de la Renault Safrane. Cette dernière ne s’écoulant qu’à un peu plus de 300 000 exemplaires. Très très loin du million de la R25.
Patrick Le Quément, à la tête du bureau de design de Renault depuis la fin des années 1980, ne jette pas l’éponge et fourmi d’idée avec son équipe. Le premier c’est donc de venir en décalage de la concurrence. Quelle est la force de Renault depuis les années 1980 ? Les monospaces. Après le Renault Espace et le Scenic, c’est donc la berline haut de gamme qui passe par la casse voiture à vivre. Si Matra prend les devants avec la conception de l’Avantime, le concept né sous le coup de crayon de Thierry Metroz et n’est dévoilée qu’en 1999. Renault dégaine sa berline aux lignes osée dès 1998.
Il faut aussi se dire que Renault a du sonder ses clients, alors qu’est-ce que vous voulez ? De l’espace ! On se moque de la forme, mais on veut de l’espace à bord. Le design intérieur semble avoir dicté l’extérieur. De toute manière, Renault on juge la Safrane trop timide en termes de design extérieur. Le constructeur veut réaffirmer sa position haut de gamme. Misant sur le savoir-faire français, de beaux moteurs, un intérieur spacieux et surtout s’éloigner de la banale Safrane. Même si les constructeurs allemands ont déjà presque plié le game, Renault espère avoir ses chances avec un modèle haut de gamme.
Action : un concept annonciateur et stimulant
Le concept Renault Vel Satis arrive en octobre 1998, durant le Salon de Paris. Le véhicule surprend le public avec son look radical de monovolume coupé. Le dessin extérieur est signé Florian Thiercelin, auteur du concept Initiale. À deux de doigts de se demander si Giugiaro n’aurait pas pompé, le concept de la Renault Vel Satis, pour dessiner en 2002 l‘Alfa Romeo Brera tant le profil est proche. Au passage, Vel Satis est l’acronyme de Vélocité et Satisfaction. Le concept se montre radical dans son dessin tout en étant très moderne et séduisant. D’ailleurs le concept fête le centenaire de la marque au losange.
Tout d’abord l’avant marque une véritable rupture avec le reste du style de la marque. La face avant s’éloigne à des années-lumière de la Safrane. La calandre basse est coupée en deux par le losange et s’accompagne d’un regard en hauteur et plutôt ciselé. Le capot moteur, plutôt court et courbé, remonte immédiatement au niveau du montant A. Le profil monovolume se structure autour d’une ligne latérale qui donne un certain volume au 2/3 de la voiture.
Le toit quant à lui est bas et propose un immense toit vitré panoramique sans traverse. Apportant ce qu’il faut de lumière pour les occupants. La Renault Vel Satis Concept annonce ainsi les grandes lignes du futur design des modèles haut de gamme de la marque. Certes, la future remplaçante de la Safrane, mais aussi l’Espace IV, la Laguna et surtout la Mégane II. Le parechoc avant, poinçonné, sera conservé sur la future berline.
À bord, l’habitacle s’offre un bain de lumière et une sellerie claire. Respectant la philosophie de la voiture à vivre, si chère à Renault. Les occupants se retrouvent dans un cocon raffiné avec une profusion de cuir, d’aluminium et de bois. Bien avant la Renaulution, la marque fait sa révolution avec le concept Vel Satis. Les boutons physiques disparaissent et laisse se place … à rien ou presque. La voiture mise sur le minimum avec un clavier dissimulé devant le passager avant. Renault cherche à diminuer les boutons et mettre en avant l’arrivée de l’électronique à bord des véhicules.
Enfin, détail du savoir-être français : la voiture dispose à bord de flûtes à champagne aux côtés de compartiments à rideaux, directement dans les portières. Tout est mis en avant pour un maximum de raffinement. À l’image du concept Fluence en 2004, qui propose la nouvelle vision du design Renault. L’arrière propose un vitrage fin et surtout vertical. Un élément de design qui sera inauguré dès 2001 avec la seconde génération de Renault Megane, Avantime et la future Vel Satis. Évidemment tradition Renault et clin d’œil à la Renault 16, ce n’est pas une malle, mais un hayon qui permet l’accès au coffre.
Avec elle, il souffle un vent de fraicheur sur le futur design de la marque française. Les années 2000 vont être sous le signe de l’originalité et de la différence, très loin de la standardisation actuelle des modèles et l’hégémonie du SUV. Le concept Vel Satis fait ainsi table rase du passé. La Renault Vel Satis concept va faire la polémique avec son popotin. Si l’avant se montre dynamique et salué, l’arrière perturbe avec sa lunette verticale et le coffre élancé. On lui reproche d’alourdir le dessin et ne semble pas cohérent entre l’arrière et l’avant.
Résultat : La Renault Vel Satis va être un désastre
En 2001, la Vel Satis finale voit le jour et c’est le drame. Le désastre arrive immédiatement. Face à elle, la grande berline va être confrontée au trio allemand, mais aussi au décalé Lancia Thesis, Citroën C6 et Opel Signum. Si la Thesis divise et la C6 souffre d’un retard à l’allumage, la Renault Vel Satis va faire fuir la clientèle. D’ailleurs, le haut de gamme chez Renault se divise en trois : avec le Renault Espace IV, le fameux Renault Avantime et son concept de coupé-space et la berline Vel Satis. Si l’Avantime se plante, la Vel Satis fait finalement presque pire. Seule l’administration française va être son salut pour l’écouler. Plus bas, dans la gamme, rappelons que si la Mégane adopte le gimmick de la lunette verticale, le Scenic II en fait de même, mais l’élément va très vite prendre un coup de vieux.
La Renault Vel Satis de série ne convainc pas la clientèle plutôt conservatrice. Entre 2002 et 2009, seuls un peu plus de 60 000 exemplaires trouveront preneur, à contrario de la Safrane qui, on le rappel, s’est écoulé à 300 000 exemplaires, pourtant qualifiés de fade. Renault ne jette pas l’éponge, car en Europe la marque remaquille un modèle coréen : la Samsung SM5, devenue Latitude enfin Platitude, comme son fameux sobriquet donné par ses détracteurs.
Notre article sur la Renault Vel Satis de série : à lire ici.
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Via Renault, Quattroruote
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