Parfois, notre heure de gloire vient sur le tard, voire très tard. La Renault Clio 16S, désormais trentenaire, connaît enfin la gloire après des années dans l’ombre de sa sœur, la Clio Williams. Pourtant, la petite Renault a tout d’une grande… GTI ! Avec sa plastique discrète trahie par sa prise d’air sur le capot, la petite Renault embraque un noble 4 cylindres 16 soupapes. Alors oui, chez Renault, on retient les Renault 5 Turbo, Renault 5 Alpine, Supercinq GT Turbo, Clio Williams et surtout les différentes versions Renault Sport dont la Clio RS première du nom. Pourtant, parmi toutes ses divas, il existe donc la Clio 16S, l’une des premières sportives au losange à abandonner le turbo.
C’est l’histoire d’une Clio, de Jean Ragnotti et du groupe A
Pour le lancement de la Renault Clio 16S, la marque met les petits plats dans les grands avec une première présentation sous un déluge et accompagnée de Jean Ragnotti. Surtout, la Clio 16 soupapes, qui succède à la Renault 5 GT Turbo, apparaît d’abord en versions « coupe »; en version course. L’événement a lieu durant le mois de novembre 1990 à Nogaro, en France, en présence du mythique pilote français. Les pilotes sont comblés et ravis. La petite sportive arrive en concession en mai 1991 et l’attente est grande. Dans le même ???, Renault engage la petite 16 soupapes dans le groupe A dans le championnat de France des rallyes, aux couleurs de la DIAC (la marque bancaire de Renault depuis 1924, devenue Mobilize Financial Services). Dès la première saison, la petite française termine deuxième au classement avec Ragnotti au volant, derrière la Sierra Cosworth 4×4 de Bernard Béguin. Une jolie performance ! Quelques mois plus tard, la Clio 16S laisse sa place à la Williams et surtout à la Clio Maxi.
La Renault Clio 16S, une petite bombinette à moins qu’il ne s’agit d’une GTI
Rappelons que la mode au début des années 1990 est aux petites sportives survitaminées de type 205 GTI, Volkswagen Golf GTI, mais aussi Polo G40, Ibiza SXI ou encore Rover 100 GTI. C’est au point que Lotus conçoit, sous la période GM, l’Elan M100 qui se prend pour une GTI. Chez Renault, le patronyme GT ou Alpine n’est pas directement renouvelé, place à la sobriété. Après la période du turbo, les années 1990 annoncent l’avènement des blocs 16 soupapes et plus. Deux chiffres et une lettre suffissent pour annoncer la couleur : 16S comme 16 soupapes. Simple, basique.
Lorsqu’elle apparaît sur le marché en 1990, la Renault Clio doit réitérer le succès de la Renault 5 mais aussi de la Supercinq. Preuve du savoir-faire de la marque française, la citadine qui n’est pas assez cher (mon fils) remporte dès 1991 le titre de la voiture de l’année. Moderne, habitacle et peu chère, elle met en pièce la concurrence, à commencer par ringardiser la Peugeot 205 qui accuse déjà sept ans de carrière. Trente ans plus tard, plus de 16 millions d’exemplaires ont pris la route. Elle a tout d’une grande, au point que pour son début de carrière, elle battra le fer avec la malicieuse Fiat Punto. Pour ne pas faire retomber le soufflé, arrive en 1991 sur le marché une énergique petite Clio, la 16S qui, à son tour, met à la retraite la 205 GTI.
Profitant de base d’un excellent comportement routier, Renault a la bonne idée d’installer le 4 cylindres atmosphérique 1,8l 16 soupapes de la Renault 19 16S. Le bloc en fonte F16 ie (ou F7P), doté de poussoirs hydrauliques, permet d’abandonner la période turbo, équipant bons nombres de Renault des années 1980. Dans tous les cas, le moteur sort 140ch, permettant à la Clio 16S de s’offrir de jolies performances avec une V/max à 212 km/h et un 0 à 100 en seulement 7,8 secondes (très proche de la lionne). De quoi transformer la Renault Clio 16S en Renault Clio GTI ⏤ comme quoi, avec des performances et un autre patronyme, la 16S aurait pu rentrer dans la légende. Précisons tout de même que le principal ennemi de la petite française n’est pas italienne ou allemande mais… son poids ! Avec 975 kg sur la balance, la petite bombinette est loin d’être svelte, lui grévant un peu ses performances, au point qu’on compare ses performances un peu en retrait à celle de la Supercinq GT Turbo ⏤ un comble.
Cependant, la fête va être de courte durée. En 1992 (millésime 1993) entre en vigueur la norme Euro 1. Le catalyseur arrive alors et fait perdre trois chevaux à la voiture. Avec ses 137ch, la française surclasse encore la Peugeot 205 GTI qui, en plus de rendre de la bouteille, tombe à 122ch, soit une perte de 8 chevaux, avec la version 1,9l catalysée. La catalyse tombe à point nommée pour Renault car le constructeur ajoute à la gamme la tonitruante Renault Clio Williams à partir de 1993 qui, de série limitée, va durer dans le temps et mettre aux oubliettes notre pauvre Clio 16S. Heureusement pour elle, la petite Clio profite d’un ronronnement bien avec elle avec son bloc.
L’intérieur comme extérieur : la même discrétion sportive
À bord, la Renault Clio 16S joue toujours encore le tableau de la discrétion. Rien ne la différencie réellement des autres Clio, si ce n’est qu’un petit détail : trois manomètres. Heureusement, pour le reste, la Clio 16S se montre bien finie et accueillante par rapport à la catégorie ⏤ on vous rappelle qu’elle a tout d’une grande ! Les critiques regretteront l’assise trop haute malgré le bon maintien des sièges, et la qualité et le confort de la sellerie. Pourtant, la Clio première du nom est une auto bien née. Sur la route, elle fait rapidement oublier la Supercinq. La citadine offre un haut niveau d’agrément de conduite qui se ressent dès les premiers tours de roues.
Tandis que l’extérieur reste sur une relative discrétion, les larges pares-chocs proviennent de la petite S mais qui bénéficie d’une couche de peinture. Dans les détails qui en font une petite sportive séduisante, notons le capot bombé avec l’entrée d’air sur le capot (permettant de refroidir le collecteur d’échappement situé derrière le moteur), les antibrouillards rectangulaires (mis en avant par le liseré gris des pare-chocs), les ailes gonflées, les assiettes abaissées… ⏤ le diable s’immisce dans les détails. Les pneus profitent de jantes dites turbines de… 14 pouces, lorsque la 205 GTI se chausse de série de 15 pouces. Sans oublier le petit logo 16S sur le hayon. Loin d’être aussi expressive que les autres GTI, la petite française veut séduire le plus largement possible. Point d’extravagance, la Clio 16S doit jouer sur deux tableaux : celui de la sportive, mais aussi de la petite BCBG des beaux quartiers. Enfin, la Clio adopte des ailes avant non pas en tôle emboutie mais en matériau composite en Noryl GTX très fin, de 2 mm d’épaisseur et qui ne pèse que 860g contre 2 kg pour une aile classique. De plus, l’aile en composite est souple : en cas de choc léger (inférieur à 15km/h), elle peut reprendre sa forme initiale.
La 205 GTI a donc enfin une vraie rivale sur le plan technique. Mais pour les adeptes des non sensations fortes, la Clio se montre aussi très confortable, bien aidée par sa liste d’équipements… en option. Plutôt moderne, la française atteint un équipement ultra moderne pour l’époque, reléguant au statut d’antiquité les GTI plutôt spartiates et dépouillées. La Clio 16S s’apparente plutôt une mignonne sleeper qu’une véritable sportive façon GTI, très loin de l’exubérance de la future Clio 2 RS.
Un châssis aux petits oignons
En 1990, Renault nous gratifie d’une voiture bien née avec un excellent châssis et la 16S en profite ! Affûté, le châssis s’agrémente de jambes McPherson à l’avant et de bras tirés pour l’arrière. La Renault Clio 16S profite en plus de ressorts affermis, de nouveaux amortisseurs, de quatre barres antiroulis arrière (comme sur la Supercinq GT Turbo) et d’articulations inédites avec des voies élargies. Pour assurer un freinage de qualité, Renault installe des freins à disques sur les quatre roues, chaussées de série en 185/60 R14 (ou 185/55 R15 en option) et des disques ventilés à l’avant. La puissance du 4 cylindres 16 soupapes est envoyée aux roues avant grâce à une boîte manuelle à cinq rapports. Renault autorise là une voiture amusante à conduire et de jolies performances avec son moteur enjôleur.
C’est bête car si le châssis est incroyable, les chrono sont eux en deçà des attentes. Avec son embonpoint, même la Clio RSI fume notre 16S. Si en haut régime la Clio 16S est un régal, le bloc se montre creux à bas régime, un défaut que n’a pas un moteur… turbo. La sportive manque de souffle entre 3 500 et 4 500 tr/min. Son truc à elle, c’est d’aller dans les tours, jusqu’à 6 500 tr/min, son régime max. Polyvalente, il semble que sur autoroute, la Clio 16S se montre bruyante, façon Bianca Castafiore. Heureusement pour le reste, elle est redoutable.
Pour le reste de l’équipement, c’est simple : tout est en option. Que ce soit la direction assistée, l’ABS Bosch à quatre capteurs et mesquinerie ultime : les vitres électriques. Cette dernière permet à Renault de proposer la Clio à un prix d’ami, avec un ticket fixé à 101 600 F (24 926 € de 2023), à peine plus élevé que sa concurrente française, la 205 GTI, qui demande 99 800 F (24 485 € actuels). Avec un tel ticket d’entrée, de nombreux clients opteront pour le catalogue d’options dont les jantes 15 pouces et la direction assistée. Avec la catalyse, le millésime 1993 se montre un peu plus à la hauteur avec une dotation en série qui comprend enfin… les jantes en alliage 15 pouces, la centralisation et les vitres électriques, sans oublier l’ajout en option d’une sellerie en cuir.
Les Evolutions de la Renault Clio 16S
La Renault Clio 16S est rapidement rejointe par plusieurs versions qui se la jouent sportive. Il y a déjà la brutale version Williams dès 1993, mais aussi les plus modestes S et RSi. Une importante palette de citadines sportives qui fait que la 16S est en étaux et se place au milieu de tout ce monde. En 1994, la 16S devient la 16V, comme sa grande sœur, la R19 16V. Elle gagne au passage une nouvelle grille de calandre, des rétroviseurs plus grands, un équipement enrichi (le volant reçoit un airbag) et un antidémarrage en option. Les très jolies jantes Turbine s’effacent au profit des jantes alu reprises de la R19 16V (et Dieu qu’elles sont vilaines !). La carrière de notre Clio 16S fut courte tout en étant passionnante et riche. On ne connaît pas les chiffres, mais selon les sources, on annonce entre 30 et 35 000 exemplaires construits en 3 ans.
L’Avis des Cylindres :
La Renault Clio 16S se montre très amusante à conduire et endurante. Son bloc se montre fiable s’il est bien entretenu mais du côté de l’électrique, ça se gâte. Les connecteurs électriques se montrent fragiles et montrent des faiblesses, tôt ou tard. On peut citer des défauts avec les moteurs de lève-vitres, le ventilateur de radiateur, le ralenti qui ne tient pas ou encore un mauvais fonctionnement du contacteur de feux de recul… Tandis que le pire arrive, elle est bien la fille de sa mère puisqu’elle rouille aussi aussi fort que la Renault 5, surtout sur la partie arrière, au niveau des ailes. Lors de l’inspection, il faut veiller à l’état des ailes arrière, des passages de roue, les planchers mais aussi le joint du pare-brise qui se décolle avec le temps. À bord, les revêtements connaissent de l’usure avec le temps, quand les plastiques vieillissent étonnamment bien.
Il est évident que, selon le propriétaire, il faut avoir un historique limpide de l’entretien de la voiture afin d’éviter les exemplaires massacrés au niveau des trains roulants, du moteur et d’une coque ayant subi les mauvais sosies d’Alain Prost. N’oublions pas que certains exemplaires ont fini entre les mains de Jacky et de ses mains expertes en massacre visuel. Au niveau de l’huile, il faut suivre les recommandations du constructeur et éviter les huiles bas de gamme ou de synthèse qui causent des casses moteur. Attention à la boîte de vitesse qui n’aime pas être maltraitée : une boîte fatiguée se reconnaît à sa seconde qui saute et donc nécessite un remplacement. En parlant de remplacement, les opérations les plus chères sont les galets tendeurs, les silent-blocs, les rotules, les roulements, les amortisseurs, la pompe à eau ou encore la courroie de distribution.
La Clio 16S devient une voiture recherchée et convoitée par les amateurs, dans l’ombre des reines comme les Renault 5 GT Turbo, Peugeot 205 GTI et surtout Clio Williams, sa contemporaine. Quand ces trois-là s’envolent en tarif, la petite Clio 16 soupapes se dégote à des tarifs plus terre à terre, même s’ils enflent. On trouve des premiers exemplaires à 9 000 € pour 200 000 kilomètres et plus. On compte 11 000 € pour 150 000 kilomètres et 2 000 € de plus pour un modèle de 100 000 km. Sous les 100 000 kilomètres ET en condition d’origine, la Clio 16S est une rareté qui réclame plus de 20 000 €. Globalement, la cote monte doucement et les exemplaires non catalysés sont plus appréciés. Mention spéciale aux petits malins qui ont importé d’Allemagne l’un des 500 exemplaires de la série limitée « Grand Prix » qui ressemble fort à une Williams avec son bleu Monaco et sa plaque numérotée. Ah… c’était pour la victoire de Michaël Schumacher en F1, tout comme la Williams Swiss Champion. Vous l’aurez compris, si la 16S est d’origine et parfaitement conservée, faites chauffer le chéquier !
Le Cylindre en + :
Vitesse max (km/h): 209 (en 140ch) / 205 (en 137ch)
Moyenne (L/100 Km): 8,4
Moteur : 4 cylindres en ligne en position transversal AV 1764 cm3, 16 soupapes, 2 arbres à cames en tête et injection électronique.
Puissance max (ch à tr/mn): 140 – 6500 / 137 – 6500
Puissance spécifique (ch/L): 79,4 / 77,7
1991 : Commercialisation de la Renault Clio 16S au mois de mai.
1992 : Millésime 93 (septembre), ajout des jantes en alliage en série et arrivée de la catalyse, la puissance tombe à 137 chevaux.
1994 : La restylage de la Clio, fait disparaitre la 16S, qui devient la Clio 16v.
1996 : Second restylage avec une nouvelle face avant. Disparition de la Clio 16S.
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Via Renault
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